Toute mention de cet article doit faire référence à son auteur et à ce site web. copyright Apsyl 2007.

PARENTALITÉ ET STRUCTURES FAMILIALES

Ce travail a fait l'objet de plusieurs présentations lors de journées d'études, colloques ou conférences 
(Angers 2006 et 2007, Périgueux 2007, Nice 2008)


Docteur Daniel ROUSSEAU

     Le thème de cette journée de travail de l'Association des Psychiatres Ligériens traitant de la famille, je me suis senti un peu obligé de donner de ma personne pour parler de la parentalité. En effet, travaillant depuis près de vingt ans à l'Aide Sociale à l'Enfance, je fais partie des quelques rares pédopsychiatres encore présents dans un foyer de l'enfance, institutions peu connues et très peu médicalisées. Ce sont des lieux terribles par la gravité des situations rencontrées. Malgré des études de médecine, une spécialisation en psychiatrie puis en pédopsychiatrie et une formation analytique, je me suis retrouvé, à mes débuts, très démuni devant une clinique qui ne se retrouve pas dans les livres et l'absence de références théoriques adaptées. Les seules repères qui tiennent la route sont les premiers textes des fondateurs de notre discipline qui se sont eux-même formés au contact d'enfants privés de leur parents, placés en hôpital ou en orphelinat. On peut en citer quelques uns : C'est Spitz et ses observations en pouponnière de la dépression anaclitique liée à l'hospitalisme, c'est Winnicott et la toxicité aliénante de certains parents, c'est Jenny Aubry à la fondation Parent de Rosan et ses observations sur les conséquences des carences de soins maternels sur les enfants, c'est Rosine et Robert Lefort pour leurs récits et leurs analyses de cures psychanalytiques d'enfants abandonnés : Nadia, Robert et les autres. Lieux terribles, certes, où nos aînés se sont formés, mais ce sont aussi de formidables postes d'observations de la nature humaine et du développement psychologique des enfants dans la durée. Du côté de cette clinique particulière de l'enfant souffrant de ses parents, il est donc possible de s’appuyer sur des bases solides. Du côté de la clinique des parents, c'est plus difficile. 

Cette démarche intellectuelle et cette réflexion sur  la parentalité se sont donc imposées à moi du fait de cette confrontation à l'horreur et à l'innommable dans la rencontre quotidienne avec les enfants confiés à l'Aide sociale à l'Enfance et leurs parents. Comment des parents peuvent-ils s'être structurés avec de telles incompétences et parfois avec des déviances très graves ? Comment les prévenir ? Tout parent n'est-il pas amené à s'interroger un jour où l'autre sur les limites à ne pas franchir vis à vis de son enfant ? Pourquoi certains ne se posent-ils pas la question ? Comment la conception moderne de la parentalité  s'est-elle construite, quelles ont été les étapes de son histoire et quels sont les liens avec l'évolution culturelle de l'humanité. Il s'agit donc d'une réflexion à la fois anthropologique, historique, clinique et psychologique sur la fonction parentale.

Enfin, le fait le plus marquant concernant la population des familles suivies par l'ASE est la conjonction de troubles graves de la parentalité et de systèmes familiaux marginaux. Je me suis donc posé la question de la relation qui pouvait exister entre ces deux éléments et c'est ce qui structurera mon propos aujourd'hui avec dans un premier temps la tentative de définir ce qui fonde la parentalité, puis dans un deuxième temps la recherche ce qui caractérise les différentes formes de vie familiale avant d'essayer de conclure sur une éventuelle relation entre parentalité et structures familiales

 

RÉSUMÉ :

LES TABOUS FONDATEURS DE LA PARENTALITÉ

Le premier tabou est celui du cannibalisme des enfants. Cronos, Saturne pour les Romains, ayant appris que l'un de ses enfants le détrônerait un jour, jugea que la seule façon de conjurer ce destin était d'exiger que sa femme, Rhéa, lui livrât chaque nouveau-né, qu'il dévorait aussitôt. On retrouve les traces de ce mythe dans les récits d’ogres et d’ogresses si chers aux enfants. Le tabou de l’infanticide est symbolisé par Abraham refusant de sacrifier Isaac. Enfin le tabou de l’inceste est incarné par Loth que ses filles sont obligées de priver de conscience en l’enivrant pour s’assurer une descendance.

UN SAUT ÉTHIQUE : LE JUGEMENT DE SALOMON

C’est Salomon qui par son jugement va introduire une définition positive de la parentalité  et son paradoxe : la mère c’est celle qui aime l’enfant plus qu’elle-même. Et c'est le renoncement à son exercice qui constitue l'expression  la plus accomplie de la fonction parentale.  Ces trois tabous et ce paradoxe imprègnent normalement le psychisme de chacun, irriguent notre culture et motivent les droits de l’enfant et de la famille dans nos sociétés. Ces quatre sauts éthiques, complémentaires les uns des autres dans la culture humaine, font l'objet d'un plus ample développement dans la série d'articles "Figures de la parentalité dans la peinture occidentale" .

LES CONDITIONS DE LEUR TRANSGRESSION

          Le simple fait d’évoquer les crimes concernant les enfants fait aujourd'hui horreur au commun des mortels. Comment certains individus peuvent s’affranchir de tels tabous ? Et envers leur propres enfants ? Ceux pour qui ces interdits fondamentaux n’ont pas été incarnés de façon claire par leurs propres parents (?) ou ont été transgressés dans les générations précédentes (?) ou encore dont les troubles psychiques ne leur ont pas permis de les intégrer (?). Ce défaut d’imprégnation psychique et culturelle des tabous qui fondent dans nos sociétés la relation entre parents et enfants est parfois associé, mais pas obligatoirement, à d’autres troubles de l’acculturation  et de l’adaptation entraînant une marginalité familiale et sociale. Les troubles mentaux et la déficience intellectuelle sont des facteurs aggravants. L’inceste et la maltraitance touchent toutes les couches sociales mais n’auront pas les mêmes conséquences qu’on soit roi (du show-biz) ou manant.

 PARENTALITÉ ET STRUCTURES FAMILIALES

         Il n’y a aucun phénomène de cause à effet entre structure familiale ou précarité sociale et indignité morale. Par contre, l’a-culturation (absence d'imprégnation culturelle) consécutive à des carences affectives et éducatives de l’enfance et la non-intégration des tabous sociaux liés à la fonction parentale peuvent se compliquer de troubles de l’adaptation qui vont parfois confiner les individus dans une situation de marginalité culturelle et sociale. C’est un risque de confusion et d’amalgame qu'il convient de le dénoncer entre la marginalité par a-culturation et la précarité sociale car elles sont diamétralement opposées. L’a-culturation, quelques en soient les causes, maintient l’individu et la famille dans la marginalité sociale. La précarité et la pauvreté, souffrances scandaleuses, ne conduisent pas, fort heureusement, à l’indignité morale. Même la prostituée à qui Salomon remet l’enfant à l’issue de son jugement, la désignant comme mère, porte en elle les marques de la parentalité la plus accomplie.

 


PLAN :

La parentalité
1- les tabous fondateurs
2- évolution du droit de l'enfant au regard de ces tabous fondateurs
3- définitions de la parentalité

Les structures familiales
1- phylogenèse des structures familiales
2- exemples cliniques

Lien entre parentalité et structures familiales?

Conclusion

Bibliographie et notes


DÉFINITION DE LA PARENTALITÉ

     Comment peut-on définir la parentalité ? La parentalité est devenu un mot très à la mode depuis les années 90 sans que soit interrogée la substance qu'il recouvre. Voilà un néologisme sorti de nulle part qui a déjà pignon sur rue avant d’avoir sa place dans le dictionnaire.  Ce terme est devenu un mot fourre-tout utilisé avec des significations très diverses :

- Dans le champ de l’action politique et sociale vers les familles (« aides matérielles et financières à la parentalité »). Parentalité est là un équivalent du mot famille.

- Dans le domaine législatif le terme de co-parentalité a été utilisé dans le rapport de loi sur l’autorité parentale dans le sens d’un partage juridique de son exercice. Autre exemple dans le domaine du droit : Déclaration de la "Commission consultative des droits de l'homme" qui définit la parentalité par ses aspects juridiques (droits des parents relatifs à l'autorité parentale et à la filiation) http://www.commission-droits-homme.fr/binTravaux/AffichageAvis.cfm?IDAVIS=566&iClasse=0

-Dans le champ sociologique il décrit plutôt les nouvelles formes de conjugalités et de vies familiales. C’est donc plutôt au sens de structures familiales qu’il faut alors l’entendre, voire de système de parenté. On parle désormais de famille monoparentale, de famille homoparentale et même de famille pluri-parentales dans le cas des familles recomposées. Il peut aussi désigner un mode de filiation (parentalité adoptive,...). Exemple : rapport du Sénat :  "Les nouvelles formes de parentalité et le droit" Rapport d'information n° 392 (2005-2006) fait au nom de la commission des lois, déposé le 14 juin 2006 http://www.senat.fr/rap/r05-392/r05-3921.pdf

- Dans le domaine éducatif, le terme de parentalité résume les pratiques éducatives dans l'éducation des enfants,  avec un souci de prévention de  la maltraitance et de promotion d'une bien-traitance. Le paradoxe est que ces différents volets s'imposent à tout adulte chargé d'enfants sans qu'aucun lien de famille ne soit nécessaire pour les rendre souhaitables envers l'enfant. C'est ainsi que dans un rapport de la conférence des ministres européens chargés des affaires familiales de mai 2006 ( "La parentalité positive dans l'Europe contemporaine") on peut lire : " Concernant la terminologie, le rapport désigne par le terme de « parentalité » non seulement les activités des parents biologiques, mais aussi celles des personnes qui ne sont pas les parents de l’enfant mais participent à sa prise en charge et à son éducation. En un sens, les mots « parentalité » et « parents » sont utilisés ici comme une sorte de raccourci englobant toutes les activités et les personnes liées au fait d’élever un enfant." http://www.coe.int/t/dg3/youthfamily/source/2006PositiveParentingMDrep_fr.pdf . Donc c'est une définition qui n'est absolument pas spécifique aux parents !.

-Dans les champs psychiatriques et psychologiques où il désigne plutôt les aspects psychologiques du fait d’être parent et de ses défaillances pathologiques. C'est surtout dans ce champ que se situera notre propos.

     Il reste très délicat de définir ce qu'est réellement la fonction parentale, qui dépasse évidement la simple fonction éducative et la filiation, et de préciser comment elle s'est constituée dans notre culture.

    Dans le champ de la psychiatrie, le terme de parentalité est un mot récent (René Clément 1985) qui avait été précédé des termes de parentification (Serge Stoleru, 1989) maternalité ( Racamier, 1961) et de paternalité qui recouvraient les mutations psychiques générées par l'arrivée d'un enfant. Winnicott avait décrit la préoccupation maternelle primaire. Tous ces processus décrivent comment les parents peuvent faire une place psychique à l'arrivée d'un enfant.

     La parentalité peut aussi s'entendre comme l'ensemble des dispositions  affectives et psychiques des parents nécessaires pour accompagner au mieux leurs enfants dans la vie, leur permettre d'advenir comme sujet, avec des références fortes aux modes d'être d'une époque et d'une culture.

     Nous allons tenter de définir la parentalité dans ses dimensions psychologiques et anthropologiques à partir des tabous fondateurs de notre culture. Il faut entendre culture dans le sens des progrès de la civilisation comme l'écrivait Freud  :

La culture humaine – j’entends par là tout ce en quoi la vie humaine s’est élevée au dessus de ses conditions animales et ce en quoi elle se différencie de la vie des bêtes, et je dédaigne de séparer culture et civilisation – présente, comme on sait, deux faces à l’observateur." L'avenir d'une illusion, Ed. PUF, p.6

 

LES TABOUS FONDATEURS

"Avec les interdits qui instaurent les privations, la culture a inauguré le détachement avec l'état originaire d'animalité. A notre surprise, nous avons trouvé que ces privations continuent d'être à l'œuvre, continuent de former le noyau de l'hostilité à la culture. Les souhaits pulsionnels qui en pâtissent renaissent avec chaque enfant. De tels souhaits pulsionnels sont ceux de l'inceste, du cannibalisme et du plaisir-désir de meurtre."  Sigmund Freud

     Freud pose dans "L'avenir d'une illusion" que les tabous fondamentaux qui fondent la culture sont le tabou du meurtre par plaisir, le tabou de l'inceste et le tabou du cannibalisme. Ces tabous sont en réalité plus ou moins tabous selon les sociétés et les circonstances, le plus tabou est sans doute le cannibalisme suivi de l'inceste et en dernier vient le tabou du meurtre pour lequel nos sociétés s’arrangent parfois ( interruption de grossesse, euthanasie, peine de mort, conflits armés légitimés...). Les relations parent-enfant sont évidemment régit par les mêmes tabous qu'on peut transposer en tabou de dévoration, en tabou de l'infanticide et en tabou de l'inceste parent-enfant. Pourtant il semble exister une plus grande difficulté pour que ces interdits transposés aux enfants entrent dans la culture. Il faut y voir là une plus grande opposition du psychisme humain à accepter que les fondements de la culture imprègne la vie intime de la famille elle-même.

PREMIER TABOU : LE TABOU DE L'INFANTICIDE

Quel traitement la mythologie a t’elle réservé à ces tabous ? L'analyse des textes mythologiques qui servent de base aux trois religions monothéistes que sont l'Islam, le Judaïsme et le Christianisme, c'est à dire le Coran, le Talmud et la Genèse nous donne quelques réponses au travers du récit du sacrifice d'Isaac, repris ou commenté dans ces trois religions.

LA BIBLE Livre de la Genèse

Gn22.1 Or, après ces événements, Dieu mit Abraham à l'épreuve et lui dit: "Abraham"; il répondit: "Me voici".

Gn22.2 Il reprit: "Prends ton fils, ton unique, Isaac, que tu aimes. Pars pour le pays de Moriyya et là, tu l'offriras en holocauste sur celle des montagnes que je t'indiquerai".

Gn22.3 Abraham se leva de bon matin, sangla son âne, prit avec lui deux de ses jeunes gens et son fils Isaac. Il fendit les bûches pour l'holocauste. Il partit pour le lieu que Dieu lui avait indiqué.

Gn22.4 Le 3ème jour, il leva les yeux et vit de loin ce lieu.

Gn22.5 Abraham dit aux jeunes gens: "Demeurez ici, vous, avec l'âne; moi et le jeune homme, nous irons là-bas pour nous prosterner; puis nous reviendrons vers vous".

Gn22.6 Abraham prit les bûches pour l'holocauste et en chargea son fils Isaac; il prit en main la pierre à feu et le couteau, et tous 2 s'en allèrent ensemble.

Gn22.7 Isaac parla à son père Abraham: "Mon père", dit-il, et Abraham répondit: "Me voici, mon fils". Il reprit: "Voici le feu et les bûches; où est l'agneau pour l'holocauste"?

Gn22.8 Abraham répondit: "Dieu saura voir l'agneau pour l'holocauste, mon fils". Tous 2 continuèrent à aller ensemble.

Gn22.9 Lorsqu'ils furent arrivés au lieu que Dieu lui avait indiqué, Abraham y éleva un autel et disposa les bûches. Il lia son fils Isaac et le mit sur l'autel au-dessus des bûches.

Gn22.10 Abraham tendit la main pour prendre le couteau et immoler son fils.

Gn22.11 Alors l'ange du SEIGNEUR l'appela du ciel et cria: "Abraham! Abraham"! Il répondit: "Me voici".

Gn22.12 Il reprit: "N'étends pas la main sur le jeune homme. Ne lui fais aucun mal, car maintenant je sais que tu crains Dieu, toi qui n'as pas épargné ton fils unique pour moi".

Gn22.13 Abraham leva les yeux, il regarda, et voici qu'un bélier était pris par les cornes dans un fourré. Il alla le prendre pour l'offrir en holocauste à la place de son fils.

Gn22.14 Abraham nomma ce lieu "le SEIGNEUR voit"; aussi dit-on aujourd'hui: "C'est sur la montagne que le SEIGNEUR est vu".

Gn22.15 L'ange du SEIGNEUR appela Abraham du ciel une seconde fois

Gn22.16 et dit: "Je le jure par moi-même, oracle du SEIGNEUR. Parce que tu as fait cela et n'as pas épargné ton fils unique,

Gn22.17 je m'engage à te bénir, et à faire proliférer ta descendance autant que les étoiles du ciel et le sable au bord de la mer. Ta descendance occupera la Porte de ses ennemis;

Gn22.18 c'est en elle que se béniront toutes les nations de la terre parce que tu as écouté ma voix".

 

 

Cette scène mythique a inspiré l’art religieux depuis toujours et l'examen des divers traitement de la scène en fonction de l'époque montre l'ambiguïté des sentiments attribués à Abraham, entre la terreur de désobéir à son dieu et l'horreur de sacrifier ce fils tant attendu.

 


Cliquer sur l'image pour l'agrandir

Le Sacrifice d'Abraham par Rembrandt (1635)
 Musée de l' Hermitage, St. Petersbourg

Voir aussi :

Salvator Dali : "Le sacrifice d'Isaac"

Gustave Doré (graveur du XIXéme) : "Le sacrifice d'Isaac"

Marc Chagall : "Le sacrifice d'Isaac" et "Abraham et Isaac en route vers le lieu du sacrifice"

 

    Cette scène mythique est fêtée par les musulmans le jour de l'Aîd-al-Kebir et par les juifs à Roch Hachana pour le nouvel an juif.

     Il pourrait paraître stupéfiant que ce soit Abraham, ce père aux pulsions infanticides qui soit désigné dans la tradition des trois religions monothéistes comme le père des croyants. Il s'en est fallu de peu que l'image d'Abraham ne soit celle de l'ogre et du père cannibale. "Mange ta soupe ou l'ogre va te manger". Abraham est considéré comme un grand prophète parce qu'il aurait accepté d'immoler son fils unique par obéissance à Dieu, preuve de sa soumission. Mais son acte de prophétie n'est-il pas plutôt dans la rupture radicale qu'il instaure avec la conception d'une divinité tyrannique qui exige de sacrifier un enfant aussi cher à son cœur ? Abraham incarne dans notre culture judéo-chrétienne et aussi islamique celui qui a introjecté le tabou de l'infanticide et des sacrifices humains dont les enfants sont le plus souvent les victimes. 

La version du CORAN n'est pas très différente...

 CORAN :

100/102 Quand l'enfant eut atteint [l'âge ] d'aller avec son père,

101/102 celui-ci dit : "Mon cher fils ! en vérité, je me vois en songe, en train de t'immoler ! Considère ce que tu en penses !"

102 - "Mon cher père", répondit-il, "fais ce qui t'est ordonné !
Tu me trouveras, s'il plaît à Allah, parmi les Constants."

103 Or quand ils eurent prononcé le salâm et qu'il eut placé l'enfant front contre terre,

104 Nous lui criâmes : "Abraham !

105 tu as cru en ton rêve !

106 En vérité, c'est là l'épreuve évidente !"

107 Nous le libérâmes contre un sacrifice solennel

108 et Nous le perpétuâmes parmi les Modernes.

109 Salut sur Abraham !

110 AINSI, EN VÉRITÉ, NOUS RÉCOMPENSERONS LES BIENFAISANTS !

111 IL EST PARMI NOS SERVITEURS CROYANTS.

112 Nous lui annonçâmes [aussi] la venue d'Isaac, prophète parmi les Saints.

113 Nous le bénîmes, lui et Isaac, [mais] parmi leur descendance se trouvent [maint] bienfaisant et [maint] malfaisant envers soi-même.

Bas relief sur une façade du Béguinage d'Amsterdam (photo Daniel ROUSSEAU)

 

 

A trois époques d'écriture différentes, on découvre trois versions différentes de la même histoire.
 
- Dans la Genèse Abraham dissimule ses intentions à son fils qui est jeune,"le jeune homme", mais Abraham est tout à fait déterminé à son geste.
 
- Dans le Talmud, qui est le commentaire de la
Torah  (Pentateuque), le fils est adulte et consentant. On imagine mal un vieillard de 90 ans lier son grand fils... 

- Dans le Coran il est précisé "quand il eut atteint l'age d'aller avec son père" et la scène est un rêve qui conduit Abraham à demander son avis à son fils.

Comme si il devenait au fil du temps de plus en plus « politiquement incorrect » d'évoquer la réalité possible de l'infanticide et qu'il y avait une atténuation de l'expression de la pulsion meurtrière. Néanmoins on peut remarquer que le consentement du fils assure toujours au père le droit de vie et de mort sur l'enfant. On verra plus loin ce que l'histoire du droit peut nous enseigner sur cette évolution. Par ailleurs, le sacrifice d'Isaac préfigure le sacrifice du Christ. 

 

La Bible évoque d'autres récits de sacrifice d'enfants 

Jeremy VII verset 3.1
"Ils ont construit un temple pour brûler leurs fils et leurs filles"

Juges XI la fille de Jephté :
"Jephté fit un vœu à Yahvé : Si tu livres entre mes mains les Ammonites, celui qui sortira le premier de ma maison pour venir à ma rencontre quand je reviendrai vainqueur du combat contre les Ammonites, celui-là appartiendra à Yahvé et je l'offrirai en holocauste. " Jephté gagne la bataille et rentre chez lui. Lorsque Jephté revint à Miçpé, a sa maison, voici que sa fille sortit à sa rencontre en dansant au son des tambourins. C'était son unique enfant. En dehors d'elle il n'avait ni fils, ni fille." 

Et Jephté après quelques tergiversations, avec l'accord de sa fille, finit par "accomplir sur elle le vœu qu'il avait prononcé".

Édouard DEBAT POSAN 1890 "La fille de Jephté"
cliquer sur l'image pour l'agrandir

Charles LE BRUN 1656 "Jephté sur le point de sacrifier sa fille

 

 

 

    Les légendes qui entourent la naissance de l'Islam comportent aussi un récit de sacrifice d'enfant qui a plusieurs versions. Le propre père du prophète a failli être sacrifié par son père pour une histoire de trésor enfoui dans un puits par Abraham lui-même (Ibrahim pour les musulmans). C'est grâce à l'intervention de ses frères et d'un tirage au sort qu'il a eu la vie sauve… au prix de cent chameaux…Dans une autre version  (Virgil Gheorghiu "La vie de Mahomet") Le grand-père du prophète promet de sacrifier son dixième fils s'il réussit à avoir des enfants, promesse qu'il doit racheter avec cent chameaux, ce dixième enfant étant son préféré.
En l'an 621, à La Mecque, Mahomet prête avec les douzes "Ansars" le " serments des femmes"  qui rappelle les dix commandements de Moïse :

"Nous jurons....
Que nous ne volerons pas.
Que nous ne forniquerons pas.
Que nous ne tuerons jamais nos enfants.
..."

Virgil Gheorghiu "La vie de Mahomet"

 

 

    A ce propos une petite digression sur les noms de Dieu. Si on reprend le texte Hebraïque de la Bible on en découvre plusieurs noms qui vont évoluer au cours des siècles. en partant de multiples dieux, les juifs ont aussi adoré les idoles, par exemple le dieu local de Jérusalem s'appelait Elyon qu'on traduit par le dieu très-haut parce que Jérusalem était construite sur une colline. Puis Elohim, qui est un pluriel, YHVH, qui est un sigle ou tétragramme, et beaucoup d'autres : Le Seigneur :  Adonaï , El Shaddaï, Tsébaoth, Adon, Baal Melek. Donc le nom de Dieu est dynamique et évolue avec la perception que les juifs s'en font. Dans la scène même du sacrifice d’Isaac ce nom passe de Elohim collectifs de dieux pas très sympathiques à Yahvé qui est plus bienveillant. Plus tard avec Moïse ce nom évoluera encore : "Je suis celui qui suis".
Voir notes.

    Abraham est appelé le père de tous les croyants par Saint Paul, il est aussi vénéré par les musulmans sous le nom d'Ibrahim. Abraham signifie "père de multitude", c'est effectivement une des figures de la paternité. Quel type de paternité ? On peut en avoir une idée au travers du nom qu'il va donner à son fils : "Isaac".

    Ce nom "Isaac" signifie "Dieu s'est réjoui" mais se rejoint avec d'autres déterminations du texte biblique : "Abraham se mit à rire" et "Sara rit en elle-même" et fait sans doute référence à une histoire hittite qui décrit un "père qui prend son fils nouveau-né sur ses genoux et se réjoui à son sujet".

    Donc cette image de la paternité c'est celle d'un père qui trône. Celle de la fierté narcissique du nombre d'enfant, une multitude, plus nombreuse que les étoiles du ciel. C'est aussi l'enfant précieux de Sara, la première femme d'Abraham qui était stérile et a enfanté à quatre vingt dix ans (  Il y a donc eu un antécédent biblique aux femmes italiennes sexagénaires qui ont mené des grossesses après fécondation assistée...)

    Donc retenons cette image d'Abraham, père qui trône, à la fierté narcissique, mais père à double face, infanticide dans l'âme mais père d'une multitude dans notre mythologie car ayant introjecté le tabou de l'infanticide.

   Le refoulement de cette pulsion infanticide au fil du temps parait manifeste dans les versions successives du récit du sacrifice d'Isaac. On observe cette même atténuation chronologique dans les diverses versions du drame d'Iphigénie, qui est aussi le récit d'un sacrifice d'enfant par son père Agamemnon pour obtenir la faveur des dieux et des vents favorables pour envoyer la flotte des alliés vers Troie.

Le premier texte est celui d'Eschyle dans son Agamemnon : 

Pour voler aux combats, pour se
venger d'une femme enlevée, il ose devenir le bourreau
de sa fille. Ce sacrifice est l'auspice du départ de
la flotte ; et des chefs sanguinaires ne sont touchés, ni
des prières et des pleurs d'un père, ni de la jeunesse
d'une vierge.
Il invoque les Dieux ; il ordonne aux prêtres (lui,
son père!) de la porter, avec effort, sur l'autel, comme
une victime, la tète pendante, ornée de bandelettes.
Sa bouche charmante est fermée ; on en craint les imprécations ;
un indigne frein la rend muette. Mais,
tandis que son sang inonde la terre, ses regards percent
ses bourreaux du trait de la pitié. Elle est belle
comme l'art ; elle semble vouloir parler, et, faire entendre
sa voix, qui, jadis, était le charme des festins,
quand le chant de cette vierge pure faisait les délices
de la vie, alors trop heureuse, d'un père adoré.

    Un autre récit se lit dans les " Chants Cypriens" dont Sophocle s'est inspiré pour écrire le second :"Agamemnon" vers 500 av J.C.. Dans ces deux premiers récits Iphigénie est sacrifiée. Euripide reprend le mythe cinquante ans plus tard et écrit "Iphigénie en Aulide" avec une substitution animale au sacrifice. Dans "Iphigénie" de Racine il s'agit d'une autre substitution avec le suicide final d'Ériphile.

DEUXIEME TABOU L'INCESTE PARENT-ENFANT

     Je posais que le deuxième tabou fondateur de la parentalité était le tabou de l'inceste parent enfant.

     Abraham a un neveu, Loth. Ils sont pasteurs, Ils ont sans doute vécu 2000 ans av J.C. Ils sont contemporains de la même famille et ont des liens d'amitié. Ils ont voyagé ensemble avec leurs troupeaux, leurs armées et leur famille. Mais  Loth est un « looser»  pour qui se succèdent les malheurs et malgré l'aide de son oncle Abraham, les déceptions se suivent. Il est chassé de Sodome, sa femme est transformée en statue de sel et il se retrouve seul avec ses deux filles dans une atmosphère de fin du monde (avec la destruction de Sodome par le feu) et de destruction de l'humanité. Ses filles ont alors une idée terrible, le saouler et coucher avec lui pour renouveler l'humanité. C'est ce qu'elles font et elles vont donner naissance à deux garçons à l'origine des tribus des Ammonites et des Moabites qui seront les ennemis chroniques d'Israël. On peut sourire en reconnaissant là la typologie de l'alcoolique incestueux mais on peut s'étonner que ce soit un tabou qui a été fondé par sa transgression. Quoique pour le tabou de l'infanticide certains exégètes prétendent qu'Abraham a bien sacrifié son fils.


plus d'info : cliquez sur l'image

Loth et ses filles (1633) est un des chefs-d'œuvre de Simon Vouet 
(Musée des Beaux-Arts de Strasbourg) 

 

TROISIEME TABOU L'INTERDIT DU CANNIBALISME

     On retrouve peu de textes mythologiques sur le cannibalisme en dehors de l'histoire de Cronos et de Médée, c'est peut-être ce qui a fait écrire à Freud que cette pulsion avait disparu aux yeux des non analystes. 

    Cronos, que les Romains nommaient Saturne, ayant appris que l'un de ses enfants le détrônerait un jour, jugea que la seule façon de conjurer ce destin était d'exiger que sa femme, Rhéa, lui livrât chaque nouveau-né, qu'il dévorait aussitôt. Mais Rhéa réussit à soustraire Zeus, son sixième enfant, à ce sort fatal. 
    Ce récit est assez similaire au massacre des innocents par le Roi Hérode poussé par le même mobile à l'annonce de la naissance du Christ.

     Le mythe de Médée qui tue ses enfants par dépit amoureux pour punir leur père Jason peut être considéré comme un équivalent de cannibalisme.
" Moi qui leur ai donné la vie,
Je leur donnerai aussi la mort".

    Les sacrifices rituels ont pour but d'apporter un bienfait à la communauté. Tandis que le meurtre des enfants de Médée a un mobile privé, la vengeance. La clinique des enfants nous fourni chaque jour des exemples de la permanence de cette pulsion chez certaines mères, qui s'exprime sous les formes cliniques de la dévoration psychique, du rapt ou du meurtre psychique qui font le lit de certaines psychoses infantiles.

 

 


Francisco Goya,
"Cronos dévorant ses enfants"

Cliquer pour agrandir les images

 

     

LES TABOUS FONDATEURS et L'EVOLUTION DU DROIT DE L'ENFANT

     Je ne suis pas juriste et je ne me sens pas compétent pour reprendre l'histoire du droit de l'enfant alors je vais me contenter de repérer les traces de ces tabous fondateurs qui délimitent la parentalité dans le droit. On verra que c'est toujours par rapport à ces interdits fondamentaux que le droit se réfère et évolue.

Le droit et l'infanticide

     C'est la question de l'infanticide qui est la plus présente dans le droit de l'enfant.

     Quand les parents revendiquent des droits vis-à-vis de leur enfant en les contestant au juge : "C'est moi le père le juge n'a rien à dire", ils n'ont pas tort vis-à-vis de l'histoire. 

    A Sparte la coutume de l'infanticide était institutionnalisée, la prise de décision de laisser vivre un nouveau né était déléguée à un groupe d'anciens . A l'époque romaine le père détenait la "patria potestas", la puissance paternelle, il avait le droit de choisir d'élever son enfant ou non le condamnant alors à mourir où à être exposé au bon vouloir des passants. C'était un droit indirect de vie ou de mort sur son enfant. "Elever un enfant" geste de l'élever à la vue de tous pour le présenter et acte de le nommer nous vient de cette coutume. Et même si le Littré associe l'élevage des dindons et des enfants dans la même rubrique, le signifiant "élever un enfant" n'a pourtant rien à voir étymologiquement avec l'élevage. Sophocle qui était un citoyen grec actif avant d'être tragédien s'est visiblement passionné pour ces questions concernant les enfants puisqu'il traite de l'infanticide dans "Iphigénie" et de l'exposition des enfants dans "Œdipe-Roi".  
L'enfant qui venait de naître, le père n’était pas libre de l’élever ; il allait le porter dans un endroit nommé Lesché, où les plus anciens de la tribu siégeaient. Ils examinaient l'enfant, et, s’il était bien constitué et vigoureux, ils ordonnaient de le nourrir en lui assignant une des neuf mille parts de terrain. Mais s’il était disgracié de la nature et mal conformé, ils l’envoyaient au lieu dit Apothètes [Dépositoire], un gouffre situé le long du Taygète, dans la pensée qu’il n’était avantageux ni pour lui, ni pour la cité, de laisser vivre un être incapable, dès sa naissance, de bien se porter et d’être fort.   

(Plutarque, vie de Lycurgue, dates incertaines, traduction Bernard Latzarus, 1950)

    Au cours de l'histoire, en particulier depuis un siècle, le droit de l'enfant va s'opposer et limiter de plus en plus le droit du père, en parallèle avec l’évolution des droits de la mère. Le premier fait marquant a été l'introduction à la fin du siècle dernier de la possibilité de la déchéance des droits paternels (on ne pouvait évidement pas parler de "droits parentaux" à l'époque, puisque la femme avait un statut juridique de mineur assistée). La famille n'est plus un bien appartenant au père mais un groupe où chacun a des droits réciproques. C'est sans doute ce que François de Singly nomme de son coté l'avènement du Soi dans la famille.

     Les parents ont-ils le droit de vie et de mort sur leur enfant. Le corps de l'enfant appartient-il à ses parents ? Les débats contemporains sur les délais légaux de l'IVG, sur la contraception ou sur l'IVG pour les mineures, sur la procréation médicalement assistée et les risques d'eugénisme, reposent, chaque fois, cette question de l'infanticide.

    Le paradigme de cette évolution est l'arrêt Perruche de la cour de cassation en 2000 qui autorisait un enfant handicapé à être indemnisé d’être né. Trois arrêts de juillet 2001 ont modulé cet arrêt en accordant une indemnisation aux parents mais pas aux enfants dans trois autres cas pour lesquels le dépistage anténatal avait été insuffisant. Dans sa plaidoirie en juillet 2001 l'avocat général Jerry Sainte-Rose avait finement décrit que cela risquait d'entraîner une dérive incontrôlable où l'enfant pouvait en arriver à porter plainte contre sa mère ou ses parents du fait même qu'il vive. De son coté le Comité consultatif national d'éthique (CCNE) s'était opposé à la reconnaissance d'un "droit de l'enfant à ne pas naître" handicapé. Ce serait la judiciarisation du "Ce n'est pas moi qui ai demandé à naître" avec demande d'indemnisation du fait de vivre. On voit là une bascule du droit qui a évolué du droit de vie ou de mort du père sur l'enfant à un droit de rétorsion de l'enfant envers ses parents pour lui avoir donné la vie.

Le droit et l'inceste

      Claude Levi Strauss avait dans "Les structures élémentaires de la parenté" fondé le tabou de l'inceste comme universel et fondateur des règles de la parenté, obligeant à ce saut culturel de l'humanité qui a été l'obligation de l'exogamie : les individus d'une génération ne peuvent prendre femme qu'en dehors de la horde, de la tribu ou de la famille. Beaucoup d'entre vous ont du avoir entre les mains ce délicieux petit roman de Roy LEWIS "Pourquoi j'ai mangé mon père" qui fait le récit de l'humanisation des pithécanthropes et où l'on peut lire les débuts rocambolesques de l'exogamie obligatoire.

    Vis à vis de la parentalité, ce n’est pas uniquement de la promotion de l’exogamie dont il s’agit mais surtout de l'interdiction fondamentale d'un commerce sexuel entre parent et enfant. Pour ce qui est de l'interdit de l'inceste parent enfant on peut remarquer que notre société l'a explicitement accepté mais ne veut rien en savoir, ne veut toujours rien voir quand c'est le cas. Ce n'est que depuis trente ans que les médecins peuvent s'affranchir du secret médical et seulement depuis dix ans qu'ils ont un devoir de signalement. Dans la longue histoire du droit c'est très court.

UNE DEFINITION POSITIVE DE LA PARENTALITE

     Peut-on proposer une définition positive de la parentalité. J'en proposerai trois, une mythologique, une légale et une pratique. 

     La définition mythologique de la parentalité la plus emblématique c'est évidemment le jugement de Salomon. Tout le monde connaît ce jugement qui fait choisir à Salomon une mère qui l'aime à un enfant disputé, sans se poser la question de sa filiation légale ou biologique. Salomon choisi comme critère de la parentalité le choix par un adulte de céder sur sa propre jouissance et de refuser de prendre l'enfant comme objet (pouvant être dévoré, tué, ou utilisé comme objet sexuel) et donc d'accepter d'en être séparé pour le bien même de l'enfant. La mère qui l'aime est celle qui préfère être séparée de cet enfant pour que celui-ci vive. Elle lui accorde un statut de sujet indépendant, distinct d'elle.  Car c'est affirmer le bien et l'avenir de l'enfant comme supérieur au droit et au désir de son parent d'exercer sa fonction parentale. En d'autres termes, le parent accepte de se sacrifier pour le bien de son enfant. C'est un renversement conceptuel total par rapport au sacrifice d'Isaac où l'enfant est de toutes les façons sacrifié, mort ou vif,  à l'économie mystique de son père. Voilà le paradoxe de la parentalité  : c'est le renoncement à son exercice qui en constitue l'expression  la plus accomplie. C'est un saut éthique dans la culture humaine.

Le jugement de Salomon (970 -933 avant Jésus-Christ) :

 

Poussin, Le jugement de Salomon
Musée du Louvre
cliquer pour agrandir l'image

voir article complémentaire : Le jugement de Salomon

Commentaires :
     On constate que l'enfant est mort pendant le sommeil de sa mère. On ne peut exclure un infanticide car l'étouffement dans le lit de la mère a toujours été le mode d'infanticide le plus commun, qui a conduit l'Eglise au moyen âge à interdire aux mères de prendre les bébés dans leur lit, bien avant que les psychanalystes, afin d'éviter aux enfants d'être confrontés de trop près aux ébats amoureux de leurs parents, ne prescrivent les mêmes conseils.

 

Alors deux prostituées vinrent se présenter devant le roi (Salomon). L'une dit : "Je t'en supplie, mon seigneur; moi et cette femme, nous habitons la même maison et j'ai accouché alors qu'elle s'y trouvait. Or, trois jours après mon accouchement, cette femme accoucha à son tour. Nous étions ensemble, sans personne d'autre dans la maison; il n'y avait que nous deux. Le fils de cette femme mourut une nuit parce qu'elle s'était couchée sur lui. Elle se leva au milieu de la nuit, prit mon fils qui était à côté de moi - ta servante dormait - et le coucha contre elle; et son fils, le mort, elle le coucha contre moi. Je me levai le matin pour allaiter mon fils, mais il était mort. Le jour venu, je le regardai attentivement, mais ce n'était pas mon fils, celui dont j'avais accouché". L'autre femme dit : "Non ! mon fils, c'est le vivant, et ton fils, c'est le mort"; mais la première continuait à dire : "Non ! ton fils, c'est le mort et mon fils, c'est le vivant". Ainsi parlaient-elles devant le roi. Le roi dit : " Celle-ci dit : "Mon fils, c'est le vivant, et ton fils, c'est le mort"; et celle-là dit : "Non ! ton fils, c'est le mort, et mon fils, c'est le vivant" ". Le roi dit : "Apportez-moi une épée !" Et l'on apporta l'épée devant le roi. Et le roi dit : "Coupez en deux l'enfant vivant et donnez-en une moitié à l'une et une moitié à l'autre".  La femme dont le fils était le vivant dit au roi, car ses entrailles étaient émues au sujet de son fils : "Pardon, mon seigneur ! Donnez-lui le bébé vivant, mais ne le tuez pas ! " Tandis que l'autre disait : "Il ne sera ni à moi, ni à toi ! Coupez ! " Alors le roi prit la parole et dit : "Donnez à la première le bébé vivant, ne le tuez pas; c'est elle qui est la mère".
Tout Israël entendit parler du jugement qu'avait rendu le roi et l'on craignit le roi, car on avait vu qu'il y avait en lui une sagesse divine pour rendre justice.

(1 Rois 3,16-28)

 

Texte issu de la loi n° 70-459 du 4 juin 1970, modifié par la loi n° 87-570 du 22 juillet 1987 et complété par la loi n° 86-17 du 6 janvier 1986

Si la santé, la sécurité ou la moralité d'un mineur non émancipé sont en danger, ou si les conditions de son éducation sont gravement compromises, des mesures d'assistance éducative peuvent être ordonnées par justice à la requête des père et mère conjointement, ou de l'un d'eux, (loi du 22 juillet 1987) " de la personne ou du service à qui l'enfant a été confié " ou du tuteur, du mineur lui-même ou du ministère public. Le juge peut se saisir d'office à titre exceptionnel.

La loi sur la protection de la jeunesse du Québec est plus incisive : « la protection du développement affectif et intellectuel de l’enfant, étroitement reliée à la satisfaction de ses besoins, constitue une notion clé ayant préséance sur tous les autres principes ».  (citée par Maurice BERGER et Hélène PASTRANA dans MALTRAITANCE DES TOUT-PETITS : LES PSYCHIATRES DOIVENT-ILS RESTER À LA PLACE QUI LEUR EST ASSIGNÉE ? )

 

     La définition pratique, c'est ce très gros travail de démontage de la fonction parentale présenté par Didier Houzel, sur l'initiative du ministère de la Santé (il faut le souligner) qui offre des outils opératoires pour se repérer dans les situations familiales et la répartition possible des rôles des professionnels. Ce texte coordonné par le Pr Didier Houzel,  "Les enjeux de la parentalité", (suivre ce lien) distingue l'expérience de la parentalité, l'exercice de la parentalité et la pratique de la parentalité. C'est un travail passionnant auquel il faut se référer mais que je n'ai malheureusement pas le temps de développer ici.

 

LA FAMILLE

      La tentation politique est grande de vouloir lier les troubles de la parentalité à une structure familiale particulière. En avril 99, l'ODAS et le SNATEM produisaient une étude sur l'enfance maltraitée où il était traité de l'influence des structures familiales "sur le risque de maltraitance". Trois structures sociologiques étaient décrites : La famille nucléaire ("vit avec ses deux parents"), la famille monoparentale (" vit avec son père ou sa mère"), et la famille recomposée (" vit avec sa mère ou son père et un beau-parent"). Les familles monoparentales y étaient épinglées comme les plus fortement pourvoyeuses d'enfants en danger. Néanmoins les auteurs notaient que c'était "l'inoccupation sociale ou professionnelle" du parent qui était le plus repérable.

     Mais qu'est ce qu'une famille?

     Levi Strauss écrivait : "La famille fondée sur l'union plus ou moins durable, mais socialement approuvée, de deux individus de sexe différent, qui fondent un ménage, procréent et élèvent des enfants, apparaît comme un phénomène pratiquement universel, présent dans tous les types de sociétés."

     On constate que le modèle de la famille nucléaire, que décrit Levi Strauss et qu'utilise Lacan dans "les complexes familiaux", est un modèle psychologique qui ne recouvre pas toute la réalité sociale des familles. Dans notre société occidentale coexistent de multiples types de structures familiales, avec chacune leur propre fonctionnement, qui questionnent nos propres modèles théoriques.

PHYLOGENESE DES STRUCTURES FAMILIALES

     La relecture de Durkheim, sociologie français du siècle dernier, permet de décrire une phylogenèse des structures familiales que l'on peut énumérer dans une succession certes imaginaire mais opératoire : 
     - Première image : la horde livrée à la loi d'un père mythique et tyrannique (relisons "Pourquoi j'ai mangé mon père" de Roy Lewis),
     - Ensuite le clan avec une ébauche de code de conduite interne,
     - Puis la tribu qui suppose déjà un embryon d'organisation politique et d'alliances extérieures (exemple : les douze tribus d'Israël), 
     - la Rome primitive avec les "gens" , la famille agnatique et finalement la famille romaine et la toute puissance du père (patria potestas),     
      - La famille patriarcale où les enfants restent mineurs jusqu'à la mort du patriarche à l'image des familles royales et enfin 
     - la famille conjugale ou nucléaire créé par l'émancipation des jeunes dans notre société moderne, qui se caractérise par le fait que le couple parental se retrouve seul lorsque les enfants sont partis, une nouveauté dans l'histoire.

Aux cotés de ces structures familiales constituées autour de la place du père, on rencontre  : 
    - des familles totalement matriarcales où sur plusieurs générations les pères sont volatiles. 
     - Et puis le nombre croissant des séparations des couples entraînent l'apparition de plus en plus fréquentes de familles recomposées qui fonctionnent à l'image des familles africaines où tous les hommes d'une génération sont les pères de l'enfant et toutes les femmes les mères de l'enfant et tous les enfants des frères et sœurs.

     Il faut aussi citer les 
     -familles monoparentales
     -les familles adoptives
     -les familles cooptées telle que la Zadruga slave qui sont loin d'être exceptionnelles,
     -les familles étendues du monde rural devenues rares mais auxquelles se sont substituées les groupes familiaux urbains de voisinage dans les raquettes de lotissement par exemple.
     -les familles matrifocales (Franklin Frazier, Giberto Freyre, Melville Herkovit), familles composées de plusieurs enfants tous de pères différents très fréquentes aux Antilles  par exemple ( Simone Schartz-Bart : "Pluie et vent sur Télumée Miracle": "j'ai récolté viande sur viande."). 
     -Les familles homoparentales recomposées et de façon encore très marginale les couples homosexuels accueillant un enfant obtenu soit par adoption soit par insémination artificielle.

 

EXEMPLES CLINIQUES:

     Madame X a six enfants de pères différents, elle vit de façon marginale et plusieurs signalements aboutissent à une décision de placement. Le père du dernier des enfants, (4 ans 1/2) vient juste de sortir de prison, c'est un homme violent. La brigade des mineurs retire les enfants à la sortie de l'école et les confie à un foyer d'accueil. La mère ne se présente pas à la convocation immédiate du juge.. Aussitôt informé du placement des enfants, le père du dernier va reconnaître les deux derniers des enfants à la mairie et muni de son attestation d'état civil vient rapter les enfants dans le foyer. La brigade des mineurs récupère les enfants, mais le père se fait menaçant envers le personnel, et téléphone à ses enfants leur enjoignant l'ordre de fuir le foyer. Dix jours plus tard le plus jeune, aidé de son frère (6 ans) saute par une fenêtre du premier étage pour fuguer et se tasse les vertèbres. Hospitalisé en chirurgie pédiatrique il est prescrit un repos strict. Le père continuant d'interférer sans cesse dans la prise en charge quotidienne, l'enfant ne peut accepter de rester allongé et le père parvient même à obtenir que l'enfant sorte en WE chez lui où à l'évidence les consignes de soins ne seront pas respectées.

     On peut conclure de cette observation que ce père est dans la croyance de la patria potestas, de la toute puissance paternelle. Il croit que la reconnaissance à l'état civil lui accorde un droit de vie et de mort sur ses enfants, méprisant les autorités judiciaires, administratives, éducatives et médicales. Et les enfants sont pris dans une identification affolante à ce père violent au point de mettre leur propre vie en danger.

     Autre exemple clinique:

     Fabrice, 12 ans, est placé par le juge parce qu'il a déclaré au collège que son père le battait. Il est d'origine gabonaise et il vit seul avec son père en France, sa mère étant restée au Gabon. Il raconte que son père est trop sévère avec lui puis que ce n'est pas son père mais son oncle à qui son père l'a confié pour qu'il puisse poursuivre sa scolarité en France. Il explique ainsi que dans sa famille il appelle les hommes de la génération de son père "Papa" et les femmes de la génération de sa mère "Maman". Les relations s'arrangent petit à petit entre cet homme et cet enfant et Fabrice déclare alors que c'est bien son père. Le juge prononce une main levée sans qu'il ait été réellement possible d'affirmer sa filiation véritable. Ce système "familial étendu" permet aux enfants de trouver facilement des substitutions auprès d'autres adultes en cas de défaillance parentale, ce qui a été le cas pour lui au travers de ce placement temporaire.

     Autre exemple :

     Patrick, cinq ans, a été confié au foyer car sa mère l'a déposé depuis quelques semaines chez une tante et n'a plus donné de nouvelles. Il n'a jamais connu son père. Sa mère vit depuis quelques mois avec une amie homosexuelle et s'alcoolise beaucoup, elle vient très rarement rendre visite à son fils après le placement, ce qui laisse celui-ci sur un sentiment d'abandon. Patrick lui en conclut : "Si j'étais une fille, Maman m'aimerait mieux".

     Un contre exemple de la famille nucléaire :

     Luc, six ans, m'est amené par sa mère parce qu'il est impossible et qu'il insulte tous les adultes en les traitant de menteurs. C'est le troisième enfant d'une fratrie de cinq, issue d'un milieu très bourgeois où les valeurs de la famille sont portées haut. J'apprends assez vite par sa mère qu'il est un enfant adultérin, ce que tout le monde sait sauf le père légal et l'enfant. C'est pourtant l'enfant le plus proche du père, auquel il voue une admiration sans borne, cherchant à l'imiter en tout. En réaction au mensonge de sa mère, son agitation n'a de cesse d'exiger que lui et son père puissent se dire qu'ils s'aiment même si ce n'est pas les liens du sang qui les unis.

Y A T'IL UN LIEN ENTRE STRUCTURES FAMILIALE ET PARENTALITE

     Si on ne distingue pas de façon radicale les catégories que sont parent, famille et couple parental fantasmatique, on ne peut répondre à cette question et c'est l'intérêt de cette journée d'introduire à cette discrimination. Seule la famille nucléaire ou conjugale incarne la fusion, voire la confusion, de ces trois registres. Il faut aussi introduire la discrimination de la filiation et de l'affiliation dans les systèmes de parenté. A ce propos j'ai récemment rencontré une jeune fille de 12 ans en pleine rébellion contre sa famille adoptive. Elle avait été adoptée en Somalie alors qu'elle avait 8 ans et elle expliquait que personne ne lui avait demandé son avis et qu'elle n'avait jamais voulu que ces personnes deviennent ses parents. Elle voulait retourner dans son camp d'enfants de Somalie.

     Dans les autres systèmes familiaux il y a éparpillement de ces fonctions. Un même enfant peut successivement rencontrer des situations extrêmement changeantes dans le cours de son enfance. Nous connaissons tous quelques cas d'enfants à l'enfance mouvementée ayant par exemple connu la vie d'une famille nucléaire puis monoparentale, puis recomposée avec un couple homoparental d'un coté. Ces enfants ont des parents réels, une famille compliquée et ils se créent des images parentales fantasmatiques qui ont des fonctions identificatoires.

     Lacan dans "les complexes familiaux" tente de décrire la famille nucléaire comme le lieu le plus propice à l'évolution psychologique de l'enfant. Pour lui la famille conjugale concentrant les conditions du conflit fonctionnel de l'Œdipe produit des effets psychologiques sur l'individu qui font progresser les idéaux et l'inspiration créatrice dans la société. "Ce mouvement subversif et critique où se réalise l'homme (le complexe d'Œdipe) trouve son germe le plus actif dans (les) conditions de la famille conjugale. P70." "le complexe de la famille conjugale crée les réussites supérieures du caractère, du bonheur et de la création."p71.

     Qu'en pensent les enfants ? Et comment réagissent-ils à la confrontation de leurs idéaux familiaux et aux choix de vie de leurs parents? Car tout compte fait la famille est un groupe social qui répond aux choix de vie des adultes qui la créent et où les enfants doivent faire avec.

     Une des questions sous-jacentes est de savoir quels repères les enfants et les professionnels peuvent se donner par rapport à des situations encore marginales mais pas exceptionnelles que sont par exemple les couples homosexuels qui ont des enfants

     Pour ce qui est des enfants, la clinique donne quelques réponses. Les enfants de parents séparés nous enseignent qu'ils espèrent souvent très longtemps même s'il n'y plus aucun espoir que leurs parents reviennent ensemble, quitte à provoquer divers stratagèmes pour obliger leurs parents à se retrouver autour de problèmes qu'ils provoquent délibérément

     " Si je n'étais pas né, mes parents ne se seraient pas séparés". J'ai recueilli de plusieurs de mes jeunes patients cette affirmation étonnante, qui en a conduit certains jusqu'à des passages à l'acte suicidaires. La première interprétation pourrait en être œdipienne autour de la culpabilité liée aux désirs de séduction de l'enfant. Mais elle n'est pas suffisante. La séparation des parents touche parfois certains enfants sur un plan profondément narcissique qui serait la conscience que c'est leur existence même qui a transformé un couple en couple parental. Ils témoignent là de la mission qu'ils s'assignent d'assurer la cohésion du couple de leurs parents. La fierté narcissique qu'exprime un enfant à l'endroit de ses parents c'est d'abord cela : ses parents l'ont conçu et lui les a fait parents.

     C'est ce dont témoigne la souffrance chronique et destructurante de la dépression narcissique des enfants dont les parents les abandonnent sans le dire en n'assurant que très épisodiquement leur droit de visite, "Si je ne vaux même pas que mes parents viennent me voir, c'est que je ne vaux rien." En d’autres termes : " Je n’ai pas réussi mes parents ".

     Ce sont les enfants qui font de leurs parents des parents, encore faut-il que ceux-ci se prêtent au jeu et soient en paraphrasant Winnicott des parents suffisamment bons, ne les décevant que ce qu'il est nécessaire. La forme sociale que prend la famille est secondaire et n’est qu’une adaptation sociale de la vie commune, déterminée par des impératifs légaux, économiques, sociaux, coutumiers et de l’évolution de la pensée et des mœurs d’une époque.

CONCLUSION

     Les parents suivis par l'Aide Sociale à l'Enfance, plus que les autres, présentent des organisations familiales plus ou moins marginales. Mais ce qui les caractérisent, plus que ces formes de vie familiale marginale, ce sont les difficultés subjectives des enfants dont leurs parents ne se préoccupent pas. Ce n'est pas la structure familiale qui est en cause mais les capacités parentales qui sont le reflet d'une intégration réussie ou non des interdits de la parentalité et donc de leur structuration psychique. Ce sont ces troubles psychiques et de l’adaptation qui expliquent leur vie familiale et professionnelle souvent marginale. La morbidité psychiatrique dans ces familles est très élevée, mais sous des formes suffisamment adaptées pour rester bien souvent en dehors de la demande de soin et des circuits de soins. Les troubles de la parentalité sont à distinguer des troubles mentaux de la nosographie psychiatrique, même s'ils y sont parfois associés. Les maladies mentales n'entravent pas toujours la parentalité ou de façon temporaire. Une mère psychotique, un père déprimé ou des parents ayant des difficultés éducatives peuvent être capables d'identifier les troubles induits chez leurs enfants et faire une demande de soin pour ceux-ci.

     On ne saurait donc relier les structures familiales à un type de parentalité. Par contre il existe un vrai problème de santé publique dans la difficulté de prise en charge et d’offre de soins à des groupes familiaux qui n’ont pas conscience de leur morbidité et sont de gros pourvoyeurs d’enfants en souffrance.

     Pour exemple une vignette clinique de parents ayant de graves problèmes d’insertion sociale et ayant eu d’importants troubles des apprentissages sans être pour autant déficients intellectuels. Leur fils de quatre ans leur a été retiré parce qu’il avait des traces de coups. Ils reconnaissent les faits en expliquant que l’enfant se réveillait la nuit en criant depuis l’âge de deux ans et qu’excédés il leur arrivait de le "calmer un peu fort". A mon grand étonnement ils n’avaient jamais eu l’idée de demander conseil ne serait-ce qu’à leur médecin généraliste sur un possible traitement de ces troubles du sommeil qui perturbaient gravement la vie familiale.

     Je terminerai par une image qui pourrait résumer mon propos. C’est celle du père qui soulève son enfant et le fait sauter à bout de bras, provocant et les rires de l’enfant et les cris de sa mère. Dans cette scène banale, on peut entrevoir en superpositions d’images, celle d’Abraham qui se réjouit de son fils mais aussi qui le prépare à l’holocauste, celle de la présentation de Jésus bébé au Temple porté par le vieux Siméon qui prophétise son sacrifice futur, mais aussi le pater familias romain qui élève son enfant pour le nommer et le reconnaître, s’il en a décidé ainsi. Donc une scène éminemment ambiguë et traversée par les figures de la paternité qui fondent notre culture.

     Je vous remercie.


La présentation de Jésus au Temple

Rembrandt 1633

 


 

BIBLIOGRAPHIE

ODAS et SNATEM

Didier HOUZEL "Les enjeux de la parentalité" érès 1999

Roy LEWIS "Pourquoi j'ai mangé mon père"

BERGER Maurice. 1992. Les séparations à but thérapeutiques, Toulouse, Privat

Emile DURKHEIM  Textes 3. fonctions sociales et institutions. Les éditions de minuit. Paris 1975

Jacques LACAN "Les complexes familiaux".  Navarin 1984

Sigmund FREUD " Avenir d'une illusion"

Abraham SEGAL, "Abraham, enquête sur un patriarche", Plon, 1995

Edith HAMILTON, "La mythologie", marabout université 1974

FANON F "Peau Noire, masques blancs" Seuil 1952

GRACCHUS F. "Les lieux de la mère dans les sociétés afro-américaines". Thèse de doctorat du 3ème cycle, Nov 1978, Paris VII

SCHARTZ-BART Simone, "Pluie et vent sur Télumée Miracle" roman

WINNICOTT, DW "Processus de maturation chez l'enfant, développement affectif et environnement" Paris Payot 1978


ANNEXES

Sur les noms de Dieu consulter les sites suivants :

M. Damien JENDREJESKI La notion de la crainte de dieu d'après les écrits pseudo clémentins

Le nom de Dieu  par Simon K. DOSSOU

Denise Sainte Fare Garnot : Passe, Exode et Noms du Père. :

Dieu s'affirme et Lacan souligne un point important : " Je ne peux pas vous quitter sans avoir au moins prononcé le nom, le premier nom, par lequel je voulais introduire l'incidence spécifique de la tradition judéo-chrétienne, pas celle de la jouissance mais du désir d'un Dieu, le Dieu Elohim...Ce Dieu dont le nom n'est que le nom Shaddaï ", comme il est dit dans l'Exode : " Dieu parla à Moïse et lui dit :"Je suis Yahvé. Je me suis manifesté à Abraham, à Isaac et à Jacob, sous le nom d'El Shaddaï mais je ne me suis pas fait connaître d'eux sous mon nom de Yahvé. Je me suis engagé aussi, à leur livrer la terre de Canaan, etc."

Michaeli Franck propose une distinction linguistique entre deux " craintes de Dieu " :

- La crainte de Yahweh (yre ' at Yahweh), quand il est fait référence à l’alliance de Dieu avec Israël. Ce tétragramme (quatre lettres qui font YHVH ou YHWH) est le nom que se choisit Dieu quand il se révèle à Moïse dans le buisson ardent, ou quand il libère son peuple de la servitude égyptienne (Ex 20,2 ; Os 11,1 ; 12,10).

- La crainte d’Elohim (yre ' at ' Elôhîm) dans les autres cas . Eloah ou Elohim. Eloah, sa forme au singulier, est utilisée dans le livre de Job (où Eloah désigne le Dieu d’Israël), mais la forme plurielle apparaît le plus souvent. Elle désigne le Dieu d’Israël, sans référence particulière à l’Alliance, mais peut également se rapporter à une divinité païenne ou à une déesse. Cette forme plurielle fonctionne grammaticalement toujours au singulier.



LA THORA.
Les cinq premiers livres de l'Ancien Testament forment ensemble la Thora du prophète Moïse. Ces livres portent les noms suivants : Genèse, Exode, Lévitique, Nombres, Deutéronome. On les désigne aussi sous le nom de Pentateuque et on croit qu'ils ont été écrits, pour la plus grande partie, par le prophète Moïse.