Figures de la parentalité dans la peinture occidentale et les arts visuels
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Les figures de la transgression : Deux figures de la dévoration : Cronos et Médée


2- Médée : La dévoration psychique, une autre forme  de l'infanticide

Médée, dans une attente froide et déterminée, semble songeuse. Son regard  impavide laisse néanmoins poindre  mélancolie et haine témoignant d'une fureur glacée aussi visible dans la crispation de ses pieds et de ses mains. Elle paraît absente de la scène qui occupe son giron et qu'elle contient de ses bras : deux petits regards affolés et soumis.

 

Les deux bambins sont dans des postures inconfortables. Leurs yeux cherchent un appui inexistant. Leurs bras battent dans le vide. Leurs corps glissent, leurs pieds n'ont pas d'appui. Cherchent-ils le réconfort d'un portage plus contenant ou cherchent-ils à s'échapper ? L'un, apeuré, semble vouloir se dégager ; l'autre, surpris, tente de s'installer mieux. A moins que ce ne soit l'inverse. 

Leur mère, silencieuse, les bâillonne en les serrant un peu trop, à la limite de l'étouffement. On ne sait si sa main droite soutient ou retient celui qu'elle va sans doute frapper en premier. Protège t'elle le second de voir ce qu'il va advenir de son frère ou le retient-elle prisonnier de peur qu'il ne lui échappe ?

Médée, répudiée, offre une tunique empoisonnée à sa rivale et se venge de la trahison de Jason en tuant leurs deux enfants, Phérès et Merméros : 

" Mais ici je change de langage, 
et je pleure sur ce qu'il nous faut accomplir ensuite. Car mes enfants, le les tuerai ; 
nul n'est en état de les y soustraire; 
et après avoir ruiné toute la maison de Jason,
 je sortirai du pays, chassée par le meurtre de mes enfants bien-aimés, 
et l'abominable forfait que j'aurai osé". 
v 790-796

"Mon acte est résolu : au plus vite tuer mes fils, 
et m'éloigner du pays" 
v 1236-1237

Cette incongruité d'une mère mortifère est accentuée par la générosité et le galbe de ses formes qui traduisent une nature féconde mais qui est contredite par la poigne féroce avec laquelle elle tient l'arme de sa vengeance. Bijoux et diadème, portés en cet instant fatal, disent son dépit amoureux.

Ce meurtre, de par sa dimension passionnelle, est un infanticide qu'on peut classer du côté de la dévoration. 

Ce n'est pas un sacrifice rituel comme le sacrifice d'Isaac qui s'intègre dans la lignée des infanticides coutumiers et ritualisés.

Eugène Delacroix mettra plus de vingt ans à terminer ce tableau exposé au Louvre.

 

Eugène Delacroix "Médée sur le point de tuer ses enfants" ou "Médée furieuse"
Commencé en 1838 il ne le terminera qu'en 1862.
Musée du Louvre

CAMBON Armand "La Vengeance de Médée" fin 19e siècle 
Montauban ; musée Ingres

 

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