Actes de la Cinquième Journée
MÉDECINE et SANTÉ de l'ADOLESCENT

 

 

 

ADOLESCENTS DIFFICILES: entre AUTORITÉS et SOINS

 

LES POLITIQUES DE L'EDUCATION CORRECTIONNELLE EN FRANCE : ETABLISSEMENTS ET ACTEURS (vers 1830-1940)

 

E PIERRE[1]

 

Introduction

 

L’histoire de la gestion de la jeunesse délinquante et difficile aux XIXe et XXe siècles a longtemps été marquée par une démarche adhérant plus ou moins consciemment à un certain « finalisme ». Dans une vision « progressiste », les historiens partaient d’un passé lointain et noir (le début du XIXe siècle) marqué par l’absence de prise en compte du caractère spécifique de la jeunesse pour aboutir à la réforme « lumineuse » de l’ordonnance de 1945, qui repose sur la notion « d’éducabilité » du mineur délinquant, ainsi qu’à la rupture, au sein de l’administration, entre la vieille et répressive « pénitentiaire » et la jeune et éducative Direction de l’éducation surveillée, l’ancêtre de notre PJJ. Dans cette logique, étaient privilégiés les événements qui semblaient annoncer la fin (1945). Parallèlement, une vision des représentations de l’enfance coupable découpée en stades ou en phases plus ou moins bien déterminés d’un point de vue chronologique c’est développée. Les années 1830-1880 seraient les années de l’enfance coupable, à punir donc, auxquelles succèderaient, entre 1880 et 1930, les années de l’enfance victime (de ses parents, de son milieu social), à protéger. Cette vision qui reflète certains changements dans le traitement de la jeunesse à problème et permet en particulier de prendre en compte la mise en place d’une justice plus protectrice (lois de 1889, 1898 et 1912) aux débuts de la IIIe République triomphante est cependant beaucoup trop simpliste. D’une part, l’histoire de la prise en charge de la jeunesse délinquante n’est pas linéaire et ne se décline pas du mal vers le meilleur, de l’ombre vers la lumière. D’autre part, chaque période comprend des éléments répressifs et des éléments plus protecteurs. Ainsi, presque toutes les lois qui structurent ce champ particulier mêlent intimement ces deux aspects. L’historien doit prendre en compte cette ambivalence et, surtout, avoir conscience qu’il existe une tension permanente dans ce champ entre ces deux éléments qui évoluent, souvent à un rythme rapide, en fonction du contexte politique et social, et du jeu des différents acteurs impliqués dans cette histoire.

Cette histoire de la prise en charge des jeunes délinquants doit donc toujours être rapportée au contexte politique (idéologie) et social national, bien sûr, mais aussi à l’organisation judiciaire et à ses mutations, aux évolutions législatives et réglementaires qui structurent le dispositif. Il faut aussi prendre en compte la tradition centralisatrice et bureaucratique de l’Etat en France. Ainsi, l’Administration pénitentiaire et ses fonctionnaires sont omniprésents dans cette histoire, s’opposant parfois aux décisions des parlementaires et même des ministres, souhaitant en tout cas en permanence garantir leur contrôle sur les établissements publics et privés. Nous le verrons, logiques politiques et logiques administratives coïncident rarement.

 

La difficile naissance des colonies agricoles et la défaite des philanthropes (1830-1880)

 

La question pénitentiaire

La question de la jeunesse délinquante et difficile apparaît, en tant que problème social, en France dans les années 1830 et 1840. Elle est le fruit des débats du champ pénitentiaire, des échanges internationaux entre différents philanthropes et réformateurs des prisons, ainsi que du contexte social et politique de la monarchie de Juillet et de la seconde République[2].

Le deuxième quart du XIXe siècle représente une période d’inquiétude pour les élites sociales, qui voient la société française se modifier sous les effets de l’industrialisation, et surtout de l’urbanisation. Alors que le mode de domination traditionnel des notables semble de plus en plus inopérant, ceux-ci se persuadent facilement de la montée de la débauche, de l’ivrognerie et de la corruption parmi les classes inférieures, principalement urbaines. Parmi les élites se développe un discours sur la « démoralisation » des pauvres. Les premières enquêtes sociales dressent un sombre tableau de la condition ouvrière et de la moralité des classes laborieuses : baisse des mariages, désorganisation de la famille, hausse de l’illégitimité sont dénoncées. Dans les discours des groupes dominants, la classe ouvrière apparaît victime des évolutions économiques et de la paupérisation, mais plus encore de ses instincts mauvais, de son penchant au vice, de son absence d’éducation et de morale. Les observateurs sociaux, tout en notant la grande misère des ouvriers qui les pousse à accomplir de longues journées de labeur, à vivre dans des taudis, et à vendre le travail de leurs enfants, insistent toujours en dernière analyse sur la responsabilité ultime de ces même ouvriers dans leur situation précaire.

Dans ce climat social agité et anxiogène prend naissance un vaste débat sur l’emprisonnement, que l’on appelle alors couramment la « question pénitentiaire »[3]. Si celle-ci débute sous la Restauration, avec en particulier la création de la Société royale des prisons[4], c’est sous la Monarchie de Juillet qu’elle connaît ses développements les plus intenses. Nombre de dissensions et de controverses opposent alors les spécialistes de l’emprisonnement et de l’amendement des détenus. Des livres, des revues spécialisées, des sociétés charitables ou philanthropiques, les journaux nationaux, les tribunes parlementaires abritent alors ces débats. Les jeunes occupent une place marginale et singulière dans ce débat. Presque tous les spécialistes s’accordent à reconnaître des traits spécifiques aux jeunes, qui les distinguent des prisonniers adultes. Leur réforme morale, bien que difficile, n’apparaît pas impossible.

Ce constat optimiste, qui repose pourtant sur la prise en compte de la nature souvent jugée « vicieuse » des jeunes, entraîne presque tous les auteurs à mettre en avant certains principes : le jeune ne peut subir de peines afflictives ; il doit être séparé totalement des prisonniers adultes ; il faut penser à l’élever avant de le punir. Alexis de Tocqueville, devant la chambre des députés, affirme « C’est une affaire d’éducation plutôt que de vindicte publique ; c’est une mesure de précaution plutôt qu’une peine ; et il faut considérer ici le gouvernement moins comme un gardien que comme un tuteur »[5]. Mais si les réformateurs sont unanimes pour reconnaître la spécificité du traitement des jeunes, ils se divisent sur la nature de l’établissement idéal pour réaliser ce traitement et sur le régime qui doit y être appliqué. Les articles 66 et 67 du Code pénal, qui indiquent que la détention ou l’éducation correctionnelle des jeunes doit se dérouler dans des maisons de correction, ne spécifient ni le nombre, ni la répartition géographique, ni le régime intérieur, ni la nature de celles-ci.

 

Prisons ou colonies ?

Les débats portent alors principalement sur le type d’établissement à construire pour les jeunes. Si l’idée de créer des quartiers séparés dans les prisons est assez vite abandonnée, plusieurs autres possibilités existent : prison cellulaire intégrale (modèle de Philadelphie) ou avec travail et repas en commun (modèle d’Auburn), prison organisée autour du travail industriel ou du travail agricole et, enfin, colonie agricole ou industrielle. Ces différents établissements sont au centre de polémiques infinies. L’Administration pénitentiaire, direction du ministère de l’Intérieur, qui gère les établissements, est, elle aussi, profondément divisée. Ses inspecteurs affichent publiquement des idées opposées. Louis Mathurin Moreau-Christophe, avec le soutien du préfet de Police de Paris, obtient la transformation de la prison de la Petite-Roquette à Paris en prison cellulaire pour jeunes détenus[6]. Charles Lucas, un autre inspecteur des prisons, reste favorable à des prisons mixtes, mêlant un enfermement cellulaire nocturne et une vie en commun de jour. Partisan du travail agricole, il favorise l’ouverture d’établissements pour jeunes, situés à proximité des maisons centrales, dans lesquels les détenus pourront pratiquer les travaux des champs[7]. L’Administration laisse alors se construire des établissements reposant sur des conceptions opposées. Il existe également des possibilités pour les initiatives privées, qu’elles soient le fait de laïcs ou de membres des églises. Des établissements privés ouvrent dans plusieurs villes. Ils répondent eux aussi à des programmes et à des systèmes correctionnels antagoniques[8].

Cependant, dans les années 1840, le débat se focalise entre partisan de la prison cellulaire et défenseurs des colonies agricoles. En effet, l’idée se répand alors de regrouper les jeunes dans des institutions spécifiques, situées à la campagne, et de les appliquer aux travaux des champs. Les promoteurs des établissements agricoles fondent leur système sur une critique du sort réservé aux enfants dans les prisons, et sur la croyance en des vertus morales attachées au travail du sol et au contact avec la nature. Poursuivant aussi un but sociologique plus ample, ils espèrent limiter l’exode rural, qui s’accompagne, pensent-ils, de nombreuses conséquences néfastes. Les promoteurs de l’idée de colonisation agricole la considèrent comme un moyen de soulager la misère, de combattre le paupérisme, et de moraliser les indigents. Ils pensent que le défrichement de nouvelles terres et la conquête d’espaces inexploités permettent de combattre la pauvreté.

Dans le débat pénitentiaire, le mouvement en faveur des colonies agricole bénéficie alors de deux atouts majeurs par rapport à la prison cellulaire : la double légitimité donnée par des expériences étrangères, et par la réussite éclatante de la colonie tourangelle de Mettray.

Je n’insisterai pas sur le premier point. Il suffit de savoir que les colonies agricoles bénéficient de l’exemple de réalisations étrangères et, surtout, du soutien d’un courant de pensée international. Les premières réalisations de colonisation agricole se situent aux Pays-Bas. Leurs résultats sont plus que médiocres, mais un véritable mouvement d’opinion diffuse une image très favorable de ces expériences présentées comme une véritable réussite. Vers 1830, beaucoup y voient un moyen de résoudre le paupérisme[9]. Les établissements de la « Société de Bienfaisance » deviennent pendant plusieurs années l’objet d’une attention particulière des réformateurs sociaux, des gouvernements, et de tous ceux qui cherchent une solution à la question sociale. La propagation du modèle des colonies agricoles se fait ainsi rapidement en France.

 

Une colonie exemplaire Mettray

Parallèlement, une colonie française connaît une réussite retentissante : Mettray. Cette première grande réalisation pratique est très rapidement considérée comme un établissement exemplaire. En effet, c’est à la fin des années 1830, que F.-A. Demetz, un magistrat parisien, propose d’apporter une solution pratique à la question pénitentiaire. Il souhaite mener dans son établissement privé une action moralisatrice en faveur des jeunes détenus[10]. Il pense que dans son institution, située à la campagne, il sera possible de donner une véritable éducation morale et religieuse, ainsi qu’une formation professionnelle aux jeunes. Pour ce, il introduit en France le modèle de répartition des jeunes en petits groupes, qu’il nomme « famille »[11]. Il met également en place une « école préparatoire » destinée à former le personnel de la colonie.

Pour réaliser ce projet, F.-A. Demetz possède une bonne connaissance des questions carcérales, car il a parcouru plusieurs pays pour étudier leur système pénitentiaire[12]. Son parcours dans le monde de la justice lui a permis de se créer un réseau de relations, qu’il mobilise pour ouvrir Mettray. En quelques mois, il réussit à franchir les obstacles et à réunir les conditions nécessaires à la fondation de Mettray. Il met alors en oeuvre une stratégie efficace : il diffuse un projet original par l’écrit et par la parole ; il s’assure de soutiens d’abord prestigieux, puis plus nombreux. Sa grande idée est de faire gérer la colonie par une société privée, ce qui lui permet, d’une part, de dissocier la gestion de ses biens personnels et celle de l’établissement et, d’autre part, de mobiliser les élites sociales en faveur de la cause des enfants délinquants, en faisant jouer un sentiment d’émulation. Il trouve dans le groupe des « membres fondateurs » de Mettray toutes les relations politiques (des légitimistes aux républicains) dont il a besoin, tous les relais nécessaires dans le monde de la finance (en particulier la haute banque protestante), toutes les introductions auprès de l’administration supérieure. La colonie de Mettray ouvre en 1839.

Pour beaucoup, le rôle de F.-A. Demetz, la forme juridique et l’organisation administrative de Mettray symbolisent l’importance du monde privé dans les établissements pénitentiaires. Mettray est une société privée, dirigée par un Conseil d’administration. Il faut cependant noter la bienveillance de l’Administration dans les démarches qui aboutissent à l’ouverture de la colonie. Mettray bénéficie de subventions considérables. Elle reçoit rapidement des jeunes provenant de quasiment toute la France. Enfin, les hommes politiques et les fonctionnaires participent particulièrement nombreux et aux postes les plus importants au conseil d’administration de la « Société Paternelle ». Officiellement, il semble y avoir un accord parfait entre F.-A. Demetz, le conseil d’administration de la « Société Paternelle », et l’Etat. La Société paternelle gérerait librement un établissement, y appliquerait les principes éducatifs proposés par F.-A. Demetz, et l’Administration, respectueuse de l’initiative privée, appuierait, sans exigence particulière, cette expérience. Mettray représenterait ainsi une des réalisations les plus abouties de la philanthropie[13].

Cependant une lecture attentive des archives et une bonne connaissance du contexte doivent permettre de moduler très nettement cette appréciation[14]. Il apparaît, en effet, que F.-A. Demetz possède une marge d’action très limitée et qu’il se retrouve, bien souvent, « instrumentalisé » par l’Administration. Par exemple, les exigences de celle-ci le contraignent à changer le mode de recrutement des jeunes détenus, ainsi que le régime intérieur de la colonie. Il ne peut résister non plus à l’envoi massif de jeunes détenus à Mettray (700 à 800 à certaines périodes), qui le force à modifier tout son programme éducatif. Pour l’Administration, Mettray n’est plus tant un établissement d’éducation qu’un lieu lui permettant de poursuivre une politique répressive. Depuis les années 1820, et la découverte des maux de la prison, les choses ont largement changé. Les philanthropes n’ont plus les moyens de s’opposer à l’Administration et à ses inspecteurs. Pour fonder Mettray, F-A. Demetz doit accepter les injonctions administratives, qui dénaturent en grande partie le projet initial. Sa liberté d’action est extrêmement réduite. Les philanthropes ne sont en réalité que les maîtres d’œuvre fictifs de la colonisation agricole. Ce qui n’empêche pas le mouvement de colonisation de se poursuivre.

En effet, à la suite de Mettray, plusieurs colonies agricoles privées pour jeunes détenus ouvrent. Mais l’Administration pénitentiaire alors accompagne plus le mouvement qu’elle ne le suscite, car pour plusieurs de ses membres, l’affaire n’est pas réglée. Ils n’attendent qu’une occasion pour remettre en cause ces fondations. Ainsi, la fin des années 1840 montre plutôt une poussée des partisans de la cellule tant sur la scène nationale qu’internationale. Mais la révolution de février 1848 et l’instauration de la seconde République modifient une nouvelle fois les rapports de force. Les changements politiques entraînent des modifications dans la composition de l’Administration pénitentiaire. L'idée d'un recours important à la solution agricole d’un point de vue pénitentiaire progresse alors, pour les adultes comme pour les jeunes.

Avec la disparition rapide de la République humaniste et le traumatisme né des événements insurrectionnels de juin 1848, qui favorise le regroupement de toutes les forces conservatrices, la solution agricole s’impose progressivement. Celle-ci possède de multiples avantages, dont celui de pouvoir répondre rapidement et sans dépenses excessives au gonflement du nombre de prisonniers. Très rapidement (1850) une loi est votée.

Il s’agit pour l’Etat d’isoler les jeunes détenus des détenus adultes, de les éduquer, de les appliquer « incessamment » à des travaux et, enfin, de les patronner. Autant de missions qui ne peuvent être assumées que par des colonies agricoles privées. La loi confirme le rôle et permet la généralisation des colonies. Son rapporteur, H. Corne, insiste sur la nécessité d’accorder une préférence aux établissements privés, car ils bénéficient d’un personnel plus attentif, plus zélé, plus dévoué, que les fonctionnaires des établissements publics. De plus, les colonies privées, même soutenues par une indemnité de l'Etat, coûteront toujours moins cher que les établissements publics. La colonie agricole privée apparaît alors comme l’établissement idéal pour éduquer les mineurs détenus[15]. Une population échappe cependant à la colonie agricole, celle des jeunes délinquantes. Il apparaît alors difficile, pour des raisons pratiques de surveillance, de mettre les jeunes filles aux travaux des champs[16].

Une lecture attentive des débats parlementaires montre qu’à aucun moment le projet n'a été appréhendé dans son orientation générale. Pas un représentant ne s’est interrogé sur la nature de l’éducation correctionnelle qui va être mise en  œuvre dans les colonies, ni sur le choix d’une formation agricole pour des enfants qui viennent souvent des milieux urbains. Personne n’a mis en cause le choix de la terre pour moraliser et éduquer. Presque personne n’a critiqué l'appel fait à des établissements privés pour élever des jeunes, dont la tutelle revient à l'Etat. Il faut dire que le vote de cette loi est indissociable du contexte de peur sociale et des traumatismes, nés de l'affrontement violent entre l’armée, la bourgeoisie et le peuple parisien en juin 1848[17]. Ces événements constituent un véritable séisme et favorisent des recompositions politiques, au-delà des divergences d’idéologies et de croyances. Les gouvernements conservateurs d’après juin poussent fortement à l’adoption de la solution agricole dans les prisons, pour les jeunes comme pour les adultes, car la répression sociale demande un accroissement rapide des places disponibles. Disposant d’espace, rapidement aménageables, les colonies peuvent recevoir des effectifs considérables d’enfants. Il ne faut pas négliger cet aspect pratique. La loi du 5 août 1850 est une loi d'ordre social, à la fois répressive (elle facilite le mouvement d’enfermement des jeunes en marche depuis la monarchie de Juillet) et éducative, suivant les valeurs de l'époque[18]. L’appel à la terre, sa part idéologique de critique de la société industrielle, son caractère ambigu (coercitif et éducatif), peuvent convenir à de nombreux courants politiques. La loi de 1850 annonce donc une intervention accrue de la justice auprès des enfants des familles populaires, mais sans confier directement à l’Etat leur éducation. L’enfant retiré à sa famille est confié à un établissement privé, où il sera élevé et éduqué.

Pour toutes ces raisons, conjoncturelles ou plus structurelles, les colonies agricoles sont placées au centre du système pénitentiaire destiné aux jeunes détenus. Les choix de 1850 (enfermement, travail agricole, primauté accordée aux établissements privés) sont des choix qui marquent durablement, au moins jusqu’au milieu du XXe siècle, l’éducation des jeunes délinquants. A court terme, la loi de 1850 favorise un fort mouvement d’enfermement des jeunes et la multiplication des colonies agricoles les accueillant. Pendant plus de vingt ans, l’éducation correctionnelle des jeunes détenus repose principalement sur cet établissement. Les colonies privées connaissent un certain âge d’or, qui n’est contrarié que par la volonté de l’Administration de toujours mieux les contrôler, ainsi que de créer ses propres établissements pour leur assurer une concurrence. En dehors de cette guérilla, les colonies fonctionnent et sont peu critiquées. Les choses changent à partir du début des années 1870, alors que s’annonce une crise de la justice des mineurs qui va durer jusqu’à la seconde guerre mondiale.

 

La longue crise de la justice des mineurs (1880-1945)

 

Une critique des établissements

Le premier élément de cette crise repose sur la critique des colonies. Celle-ci débute, d’abord discrètement, à la fin du second Empire, puis s’amplifie sous la République. Les querelles entre l’initiative privée et l’Administration publique, puis entre le monde catholique et l’Etat républicain n’y sont pas étrangères, mais il faut surtout en attribuer la cause à la sclérose des établissements. Quels qu’en soient les motifs, les établissements de jeunes détenus font l’objet de plusieurs enquêtes dans lesquelles les jugements négatifs l’emportent largement, surtout pour les établissements privés. Parmi les principaux reproches faits aux colonies, nous retrouvons principalement, la primauté du travail agricole de plus en plus inadapté à la majorité urbaine de la population, l’insuffisance de la formation professionnelle (le travail tournant parfois à l’exploitation des enfants), l’inaptitude éducative du personnel, l’usage de châtiments corporels pourtant interdits par les règlements, l’absence d’un véritable enseignement primaire (obligatoire pour tous à partir du début des années 1880), l’insuffisance, parfois, de la nourriture et du vestiaire, toujours du service médical, etc. Pour la plupart des observateurs, les colonies ne réussissent pas à assurer une formation morale, professionnelle, ainsi qu’une véritable instruction aux jeunes détenus. Pire, pour certains, elles préparent de futurs récidivistes et de grands criminels. Ces critiques sont souvent accompagnées de recommandations ou même de propositions de loi pour améliorer la situation. Mais ces propositions restent sans effet. La loi de 1850 n’est pas modifiée, les nouveaux types d’établissements proposés ne sont pas fondés, l’éducation correctionnelle n’est pas réorganisée. Faute de réforme, de moyens financiers, et d’une volonté politique suffisante, l’éducation correctionnelle s’enfonce encore plus dans la crise. Les colonies agricoles survivent de plus en plus difficilement. Les effectifs des établissements privés s’effondrent et plusieurs doivent fermer[19]. La décrue est nette : ils sont 22 en 1889, 20 en 1895, 18 en 1902, 15 en 1908, 8 en 1912[20]. Petitement, l’Administration se contente de l’inversion du rapport de force entre ses établissements et ceux du secteur privé, sans s’apercevoir que c’est toute l’éducation correctionnelle qui s’enfonce dans la crise.

 

Une désaffection générale

Le second élément de cette crise repose, cette fois, sur une désaffection quasi générale à l’égard des colonies. Celle-ci touche aussi bien l'opinion publique que les magistrats et les spécialistes de la question. Dans le Coupable, le grand écrivain national François Coppée montre que l’éducation donnée par les colonies, ainsi que l'ensemble du traitement judiciaire des jeunes délinquants, ne peuvent que produire des criminels[21]. Il s'agit là d'une idée très largement reprise par la presse. Beaucoup de magistrats montrent aussi une grande hostilité à l'égard des colonies, évitant autant que possible de recourir à l’envoi en correction[22]. Dans les cercles des spécialistes, les opinions apparaissent plus partagées. Si la critique domine souvent, certains hésitent cependant à se montrer trop sévères envers des établissements qu'ils jugent, malgré tout, indispensables. Ainsi la lecture des revues spécialisées provoque un étrange sentiment. On y trouve nombre d'articles qui, après un inventaire impitoyable des dysfonctionnements des colonies, s'achèvent sur une défense de ces établissements. Cependant cette atmosphère critique, l’absence de moyens financiers conséquents, et les échecs successifs des réformes proposées favorisent alors la recherche d'alternatives. Nous verrons cependant qu’elles demeurent insuffisantes.

 

L’échec des alternatives aux colonies agricoles

Le parlement, avec le soutien de la majorité des réformateurs des prisons organisés en groupe de pression, s’oriente vers la recherche d’alternatives à l’éducation correctionnelle. Les années 1880-1910 sont marquées par une importante production législative, qui redéfinit les différentes catégories d'enfants (tendant à assimiler les enfants délinquants aux enfants en danger), et qui favorise la mise en place de nouvelles formes de prises en charge des jeunes. Faute de solution institutionnelle, on recherche alors des solutions législatives pour sortir de la crise. En particulier, deux lois votées en 1889 et 1898 viennent modifier profondément le champ de l'enfance de justice. La première s'attaque à un des fondements essentiels du droit français : l'autorité paternelle[23]. Elle organise la déchéance ou la cession de cette dernière dans un objectif de défense des enfants « maltraités et moralement abandonnés ». Elle repose sur la notion « d'intérêt de l'enfant »[24], qu'il faut protéger de sa propre famille. Cette loi offre à l'Etat une capacité d'intervention au sein de la famille. Elle donne satisfaction aux nombreux réformateurs qui pensaient, depuis longtemps, que dans certains cas, aucune éducation ne pouvait être donnée sans une rupture définitive du jeune avec sa famille. Cependant, les débats parlementaires achoppent longtemps sur la question du financement. La loi ne prévoit aucune mesure précise pour assurer le sort de l'enfant moralement abandonné soustrait à sa famille. Les parlementaires estiment qu'il suffira de s'appuyer sur les structures de prises en charge des enfants assistés, donc sur l'Assistance publique. Cela revient à faire porter la nouvelle charge budgétaire sur les départements. Des sociétés de patronage privées pourront aussi se voir confier des enfants. La loi du 19 avril 1898 veut compléter et améliorer celle de juillet 1889[25]. Elle s'attaque en premier aux parents indignes. Cependant, lors des débats, les parlementaires ont accolé une réforme de l'article 66 du Code pénal aux dispositions concernant les enfants martyrs. La loi offre la possibilité au juge de placer les jeunes auteurs de crimes et délits dans des institutions dépourvues de tout caractère pénal. Le juge peut dorénavant confier le jeune à une personne ou à une institution charitable, ainsi qu'à l'Assistance publique. La loi modifie donc de façon radicale les principes de l'éducation correctionnelle. Elle montre une certaine défiance envers les colonies privées et publiques[26].

Les conséquences administratives, et donc politiques, de ce choix sont importantes. Les parlementaires, éclairés et influencés par les sociétés de protection de l'enfance, décident de retirer à l'Administration pénitentiaire des jeunes pour les confier principalement à des sociétés privées, et secondairement à des organismes départementaux. Mais les nouvelles solutions se révèlent rapidement insuffisantes. Les sociétés de patronage n’ont pas les moyens de leur développement et le législateur n'a rien prévu pour contribuer à leur action. Pendant plusieurs années, les patronages travaillent donc sans argent, mais cela entrave bien sûr leur capacité d'action. La loi offre une seconde alternative aux juges, la remise des jeunes à l'Assistance publique Cette institution départementale, chargée en principe des enfants orphelins, trouvés et abandonnés, présente des garanties de permanence et de pérennité ; elle dispose de quelques équipements, d’un réseau de familles d’accueil. Mais la loi provoque au sein de cette Administration une véritable révolte[27]. Très vite, dans différents départements, les services concernés refusent d'assurer l'accueil des jeunes du tribunal. Plusieurs responsables de l'Assistance dénoncent les nouvelles populations qu'on leur impose. Ils mettent en avant leur inaptitude à gérer ces jeunes, de « véritables petits criminels », incapables de rentrer dans le cadre du traditionnel placement familial. Ces discours portent. Les responsables de l’Assistance publique obtiennent l'élaboration de dispositifs administratifs puis législatifs leur permettant de rejeter en partie la nouvelle population des jeunes. Une loi votée en 1904 poursuit cet objectif ; la loi de 1912 sur les tribunaux pour enfants réserve l'intervention de l'Assistance publique aux plus jeunes.

Une dernière loi joue un rôle important dans cette histoire de l’éducation correctionnelle : la loi de 1912 qui crée le tribunal pour enfants et adolescents et importe, sur le modèle nord américain, la liberté surveillée. Ce texte a longtemps été analysé comme une rupture majeure dans l’histoire de la prise en charge des mineurs de justice. De nombreux analystes de l’époque ont voulu y voir la naissance d’une justice spécialisée, véritablement compréhensive pour les jeunes délinquants ; une réforme qui marquerait un véritable changement d’attitude face à la jeunesse dangereuse. Ils inscrivaient cette loi dans un mouvement de réforme du droit prenant en compte le délinquant, et tentant d’adapter les peines ou les mesures à sa personnalité. Les historiens nord-américains parlent eux du modèle « protectionnel » contenu dans les différentes lois occidentales instaurant les tribunaux des enfants. Mais, à nos yeux, la réforme française de 1912 est une réforme avortée qui ne met pas véritablement en place le modèle du juge paternel, compréhensif à l’égard du jeune, en conservant la justice des mineurs de 13 ans dans le cadre d’un tribunal correctionnel. Tout au plus, elle offre aux juges certaines possibilités nouvelles : la liberté surveillée, l’enquête sociale, l’examen médical, etc. Des travaux précis sur la pratique des tribunaux des enfants et adolescents montrent d’ailleurs à quel point les magistrats ont été réticents à se saisir de ces différents outils, qui rentrent parfois en conflit avec leur culture juridique classique.

 

Conclusion : paroxysme de la crise et prémices d’un renouveau

 

L’Entre-deux-guerres est marqué par une importante crise financière. Celle-ci annihile, dans notre secteur, toute volonté de réforme. Pire, l’Etat laisse à l’abandon les établissements correctionnels refusant d’augmenter subventions et prix de journée alors que l’inflation est galopante. Il n’est pas question de gonfler les déficits publics en entretenant les jeunes détenus. Les jeunes souffrent couramment de froid et de faim. Le personnel, souvent d’anciens sous-officiers de la « grande guerre », souffrant d’alcoolisme et de troubles nombreux, entretient un climat de violence extrême[28].

De leur côté, les parlementaires se désintéressent largement de la question. Une seule loi, très répressive, sur le vagabondage et la débauche des jeunes est votée, en 1921, dans un fort climat de régénération morale postérieur à la guerre. L’Administration pénitentiaire se contente de réformes de papier, changeant le nom de ces colonies publiques en Maisons d’éducation surveillée.

Les conditions sont réunies pour que naisse la grande campagne journalistique sur les « bagnes d’enfants »[29]. Devant les attaques répétées de la presse, en 1937, le ministre de la Justice décide de fermer autoritairement Mettray. Le fleuron de l’initiative privée termine ainsi une longue et douloureuse expérience. Les établissements publics, sauf rares exceptions, ne sont pas menacés par ce genre de décision. Le ministère décide cependant de tenter la réforme de certains d’entre eux, soit en introduisant les techniques éducatives scoutes, soit en favorisant la formation professionnelle. Ces réformes suscitent généralement l’hostilité du personnel en place. On commence aussi à parler (à pratiquer dans certains cas, autour du professeur Heuyer) de sélection et de classification des jeunes en fonction de leur personnalité. L’idée d'observation se construit. Des assistantes sociales rentrent dans certains grands tribunaux, des délégués (bénévoles) à la liberté surveillée sont recrutés. La « psychologisation » de la prise en charge des jeunes délinquants s'annonce ; la construction de la catégorie « enfance inadaptée » émerge timidement. Des éléments essentiels de la réforme de 1945, - formation d’un personnel spécialisé, observation puis rééducation du jeune, priorité accordée à sa formation professionnelle, intervention du psychiatre et des travailleurs sociaux- commencent à être débattus dans des ouvrages, et dans des thèses de droit ou de médecine ; parfois, localement, des expériences sont tentées. Mais les conditions sociales et politiques ne sont pas encore réunies pour permettre leur floraison.



[1] E. Pierre. Historien (Hires)  Université d'Angers.

[2] Cette partie s’appuie en grande partie sur Eric PIERRE, « Débats pénitentiaires, politiques correctionnelles et vote de la loi de 1850 », dans Michel CHAUVIERE, Pierre LENOEL et Eric PIERRE (s.d.), Protéger l’enfant. Raison juridique et pratiques socio-judiciaires (XIXe-XXe siècles), Rennes, Presses universitaire de Rennes, 1996, pp. 71-105.

[3] Pour une présentation générale des débats autour de la question pénitentiaire dans leurs dimensions humaines, religieuses, politiques et internationales, voir Jacques Guy PETIT, Ces peines obscures. La prison pénale en France 1780-1875, Paris, Fayard, 1990, 749 p.

[4] Pour l'histoire de la Société Royale des Prisons, voir l'article de Catherine DUPRAT, « Punir et guérir En 1819, la prison des philanthropes » dans Michelle PERROT (ed.), L’impossible prison, Paris, Seuil, 1980, pp. 64-122.

[5] A. de TOCQUEVILLE, « Premier rapport fait au nom de la commission de la Chambre des Députés chargée d'examiner le premier projet de loi sur les prisons, séance du 20 juin 1840 », Revue Pénitentiaire et des Institutions préventives, tome 1, 1843-1844, p. 146.

[6] Michelle PERROT, « Les enfants de la Petite-Roquette », L’histoire, n° 100, mai 1987, pp. 30-38.

[7] Christian CARLIER, La prison aux champs. Les colonies d’enfants délinquants dans le nord de la France au XIXe siècle, Paris, Editions de l’Atelier, 1994, 734 p.

[8] Marie Sylvie DUPONT-BOUCHAT et Eric PIERRE (direction), Enfance et justice au XIXe siècle. Essai d’histoire comparée de la protection de l’enfance 1820-1914, Paris, PUF, 2001, pp. 126-242.

[9] Les jugements portés sur cette expérience par les spécialistes dans les années 1850 seront beaucoup plus négatifs. Mais, le mouvement international était lancé, et leur avis ne fut pas reçu.

G. de Lurieu et H. Romand, Etudes sur les colonies agricoles de mendiants, jeunes détenus, orphelins et enfants trouvés : hollande, Suisse, Belgique, France, Paris, Librairie agricole de la Maison rustique, 1851, 443 p.

[10] F.-A. DEMETZ, Société Paternelle, fondation d'une colonie, Paris, Duprat, 1839.

[11] Sur le régime de Mettray, Jacques BOURQUIN, « Le Mettray des origines », dans Raoul LEGER, La colonie agricole et pénitentiaire de Mettray. Souvenirs d’un colon 1922-1927, Paris, L’Harmattan, 1997, pp. 113-126.

[12] A. BLOUET, F.-A. DEMETZ, Rapport à M. le Comte de Montalivet sur les pénitenciers des États-Unis, Paris, Imprimerie Royale, 1837.

[13] Nous entendons ici ce terme dans son sens générique.

[14] Eric PIERRE, « F.-A. Demetz et la colonie agricole de Mettray entre réformisme « romantique » et injonctions administratives », Paedogogica Historica, numéro spécial « Doers », XXXVIII 2002, n° 2-3, pp. 451-466.

[15] La loi prévoit une hiérarchie des établissements. Les colonies pénitentiaires accueilleront les mineurs acquittés en vertu de l’article 66 du Code pénal mais non remis à leur famille, ainsi que les enfants condamnés (art. 67-69) à des peines comprises entre six mois et deux ans de prison. Des colonies correctionnelles seront destinées aux mineurs condamnés à des peines supérieures à deux ans de prison, ainsi qu’aux indisciplinés des colonies pénitentiaires. Les mineurs condamnés à des peines inférieures à six mois resteront en prison dans des quartiers séparés des détenus adultes.

[16] Dans le texte de loi, il n’y a que trois articles réservés aux filles. La loi parle pour elles de « maisons pénitentiaires ». Les jeunes filles doivent y être « élevées en commun, sous une discipline sévère et appliquées aux travaux qui conviennent à leur sexe ».

[17] En particulier dans Maurice AGULHON, 1848 ou l'apprentissage de la République, Paris, Seuil, 1973, 254 p.

[18] Entre 1837 et 1848, le nombre de jeunes détenus a plus que triplé.

Jacques Guy PETIT, Ces peines obscures, op. cit., p. 290.

[19] 92 % de diminution des effectifs entre 1875 et 1912.

Jean-Marie RENOUARD, « De l'enfant coupable à l'enfant inadapté. Le traitement social et politique de la déviance », op. cit., p. 56.

[20] Ibid., p. 56.

[21] François COPPEE, Le Coupable, Paris, A. Lemerre, 1897, 327 p.

[22] Certains juges préfèrent condamner le jeune à de courtes peines de prison  ou à des corrections de quelques mois, plutôt que de les envoyer en correction jusqu'à leur majorité. Cette pratique est unanimement dénoncée par les réformateurs, qui obtiennent, en 1889, une circulaire du garde des Sceaux signalant les dangers des courtes peines.

Mais dans la majorité des cas les juges remettent le jeune à sa famille en vertu de l'article 66.

Paul DRILLON, « Les mineurs délinquants en province », Revue pénitentiaire, 1903, p. 1103 et 1096.

[23] Pour une présentation générale de la loi, J.-M. RENOUARD, « Actes du colloque national. Autour du centenaire de la loi du 24 juillet 1889 relative à la protection des enfants maltraités et moralement abandonnés », Archives aquitaines de recherche  sociale, n° spécial 1989-1990, 168 p.

[24] Michelle PERROT, « Sur la notion d'intérêt de l'enfant et son émergence au XIXe siècle », Actes, Cahiers d'action juridique, n° 37, 1982, pp. 40-43.

[25] Sur la loi de 1898, voir le n° spécial, dirigé par Jean-Jacques YVOREL, « Cent ans de répression des violences à enfants », Le Temps de l'Histoire, n° 2, 1999, CNFEPJJ/AHESSPJM, Vaucresson, 221 p.

[26] Pour ce passage, nous suivons E. PIERRE, « La loi de 19 avril et les institutions », Le temps de l'Histoire, n° 2, 1999, pp. 113-127.

[27] P. QUINCY-LEFEBVRE « Assistance publique et enfants difficiles vers 1900 », A. GUESLIN, D. KALIFA, Les exclus en Europe, 1830-1930, Paris, Editions de l'Atelier, 1999, pp. 202-214.

[28] Éric PIERRE, « Mettray dans les années 1920, une période noire » dans Raoul LEGER, La colonie agricole et pénitentiaire de Mettray. Souvenirs d’un colon 1922-1927, Op. Cit., pp. 127-151.

[29] Louis ROUBAUD, Les enfants de Caïn, Paris, Grasset, 1925 (2e édition), 243 p ; Henri DANJOU, Enfants du malheur! Les bagnes d'enfants, Paris, Albin Michel, 1932, 249 p ; Henri WALLON, Une plaie de la société : les bagnes d’enfants, Bourges, Secours ouvrier international, 1934. Alexis DANAN, L’épée du scandale, Paris, R. Laffont, 1961, 311 p.