Actes de la Cinquième Journée
MÉDECINE et SANTÉ de l'ADOLESCENT

 

 

 

ADOLESCENTS DIFFICILES: entre AUTORITÉS et SOINS

PLACE DU SERVICE SOCIAL DANS LA PRISE EN CHARGE PEDOPSYCHIATRIQUE OU PSYCHOLOGIQUE D’UN ENFANT ou ADOLESCENT

 

F. BERGOFFEN[1]

 

Le Service Social en Faveur des Elèves est un service de l’ Education Nationale (E.N.) Il existe 4 services à l’E.N. dont la particularité est d’intervenir auprès des élèves pour les accompagner dans leurs difficultés, si besoin dans une relation duelle :

® Service de Promotion de la Santé :            - Médical

- Infirmier

® Service d’Orientation et d’Information.

® Service Social en Faveur des Elèves.

Le service social en faveur des élèves est composé d’une Assistante Sociale, conseillère technique et responsable du service, placée sous l’autorité de Monsieur l’Inspecteur d’Académie. 24 assistants sociaux interviennent dans les établissements du second degré : collèges, lycées, lycées professionnels et occasionnellement dans les établissements du 1er degré (Protection de l’enfance.)

 

Les missions du SERVICE SOCIAL EN FAVEUR DES ELEVES s’inscrivent dans le cadre d’une prévention globale et de la lutte contre l’échec scolaire. Elles visent (entre autres) à :

 

® Contribuer à rétablir, maintenir, renforcer le lien entre l’école et les familles.

® Soutenir et aider les parents qui rencontrent des difficultés éducatives.

® Participer à l’éducation à la vie et à la responsabilité dans son sens large.

® Participer à  la prévention et à la protection des mineurs en danger ou

susceptibles de l’être.

® Aider à l’intégration scolaire.

® Accompagner l’élève en difficulté.

Dans l’institution, nous avons une place essentielle dans l’accompagnement des jeunes en difficulté. L’assistant social intervient en prenant en compte le jeune dans sa globalité : familiale, sociale, économique et psychologique.

 

POURQUOI ET POUR QUI UNE PRISE EN CHARGE PEDOPSYCHIATRIQUE EST-ELLE DEMANDEE ?

L’AFFAIRE DE TOUS…

 

Un jeune  passe environ 8 heures par jour dans son établissement scolaire, 4 jours ½ par semaine; c’est dire l’importance du lieu et de tout ce qui peut s’y jouer !!!

 

Le repérage d’un enfant en difficulté est l’affaire de tous dans un établissement scolaire : l’enseignant, le CPE, les surveillants, les agents de service. Je pense à un exemple : dans un collège, le cuisinier a été alerté par le comportement alimentaire inquiétant d’une demi-pensionnaire : plateau  vide ou ne contenant que très peu de nourriture. Il a fait part de ses inquiétudes à l’assistant social. Il a passé LE RELAIS, relais qui s’opère dans le respect des spécificités de chacun.

 

L’adolescent qui nous est «signalé» au collège ou au lycée est souvent celui qui manifeste à sa façon sa souffrance personnelle. Cela peut passer par des incivilités, des passages à l’acte, sortir sans autorisation, baisse soudaine des résultats, violence dirigée contre lui ou les autres ou bien l’enfant effacé, renfermé, isolé de façon préoccupante (celui là d’ailleurs est repéré plus tardivement).

 

L’une ou l’autre de ces situations doit nous alerter et nous permettre de décrypter une éventuelle souffrance, voire des troubles de la relation ou du comportement.

Dans les établissements scolaires l’Assistant Social travaille aussi avec ses partenaires : principal, principal adjoint, conseiller d’éducation, conseiller d’orientation psychologue, infirmière, enseignants, médecin, pour enrichir son évaluation et prévoir les aides nécessaires. C’est aussi pendant ces temps d‘ échange et d’un travail d’accompagnement de l’élève que peut apparaître l’indication d’un suivi thérapeutique pour un jeune et la personne la mieux placée pour lui proposer (mise en place de cellule de veille).

Il est important de prendre du temps, de créer un lien avec le jeune puis avec sa famille pour que ces propositions de prise en charge puissent être comprises et acceptées par les personnes concernées. Sans adhésion, l’aide ne sera, à mon avis, pas investie ou ne se mettra pas en place. Nous le constatons avec des adolescents qui nous racontent avoir été emmenés dans un centre de soin lorsqu’ils étaient petits sans avoir bien compris pourquoi.

 

QUELLE EST LA DEMANDE DE L’EDUCATION NATIONALE A L’EGARD DES SERVICES DE PEDO-PSYCHIATRIE ?

Je souhaite préciser que lorsque nous rencontrons un jeune en difficulté, nous pouvons avoir 4 grandes orientations de travail :

® L’accompagnement Social.

® La prise en charge Educative.

® La prise en charge Psychiatrique.

® Le rappel à la Loi.

Souvent la grande tentation dans le milieu scolaire est la résolution presque dans l’immédiat du problème : «il faut que ce jeune voit quelqu’un». C’est de l’ordre du magique, comme si tout pouvait s’arranger par la mise en place d’une intervention, d’un suivi psychiatrique ou éducatif.

Il reste que les difficultés des élèves sont parfois très difficiles à vivre et à supporter par les professeurs. Ils ont bien souvent tout tenté au niveau pédagogique et je pense qu’ils éprouvent à ce moment là un sentiment d’inquiétude ou de découragement et veulent une prise en charge extérieure. Le problème de l’élève n’est plus de la compétence institutionnelle, mais de l’extérieur.

 

Là encore le relais est nécessaire car ils ne peuvent pas être à la fois le professeur, l’éducateur, le thérapeute d’un jeune qui a besoin de temps (bien souvent plus d’une année scolaire) pour accepter sa souffrance, pour accepter d’en parler et accepter l’idée de "soins Psy". Le temps de l’accompagnement social, psychologique, médical n’est pas celui du temps scolaire même si l’école reste le lieu de repérage.

 

En ce qui concerne le sujet qui nous intéresse aujourd’hui, je voudrais expliquer tout le travail en amont que nous essayons de mettre en place  pour qu’une prise en charge par le secteur pédopsychiatrique  puisse être bénéfique pour un jeune.

De notre place d’assistant social à l’école nous remarquons souvent l’incompréhension des jeunes à l’égard d’une prise en charge psychiatrique ou psychologique : « Pourquoi faire ?», « Combien de temps ?», « Avec qui ?», « Est-ce qu’on peut changer ?», « Comment ça s’arrête ?». Nous expliquons, mais il nous paraît souhaitable que le service de soin réponde de nouveau, précise à ce jeune les modalités de la prise en charge.

 

RETICENCE D’UN JEUNE A LA PROPOSITION D'UNE PRISE EN CHARGE ?

 

Exemple : Dans un collège une jeune fille de 12 ans me révèle qu’elle a subi des attouchements sexuels lorsqu’elle était enfant. L’affaire est portée à la connaissance du tribunal et jugée. Commence alors un long travail d’accompagnement avec cette jeune de la 5ème à la seconde.

Elle refuse toute prise en charge psychologique, pourtant à mon avis nécessaire compte tenu du contexte familial  ou de la gravité du traumatisme, sans doute non réglé. Il y a eu des tentatives  mais cette jeune n’était pas prête.

En fin de seconde, elle est amoureuse. Les questions autour de la sexualité réveillent  des angoisses latentes. A ce moment là de sa vie, elle a un besoin absolu de comprendre ce qui s’est réellement passé lorsqu’elle avait 6 ans. La question de la prise en charge psy. se repose et la jeune ne semble plus être hostile. Le problème qui subsiste pour elle, c’est d’obtenir l’assentiment de ses parents. L’accompagnement social se poursuit pour lui permettre de franchir cette étape.

 

Cet exemple montre qu’il ne suffit pas de dire à un jeune d’aller consulter un psy., même si nous, nous sommes convaincus de la nécessité de cette prise en charge. Le jeune peut ne pas en voir l’intérêt.

Ses craintes sont :

® La peur du diagnostic médical, de la maladie mentale «Je ne suis pas fou».

® La peur des questions qui peuvent l’amener à se dévoiler.

® La peur de  trahir ses proches, confusément il sait qu’il doit les protéger.

Il faut donc qu’il s’autorise et qu’il soit autorisé à être aidé. Tout ceci peut se faire grâce à la parole, à l’échange et au temps.

 

LES RETICENCES DE LA PART DES FAMILLES :

Une prise en charge psychiatrique ou psychologique implique le fonctionnement familial, les parents : sont-ils inquiets ? Qu’attendent-ils ? Jusqu’où peuvent-ils l’aider, l’accompagner ?

On retrouve souvent ces peurs :

® La peur d’être jugé.

® La peur d’être de mauvais parents.

® La peur des révélations, des secrets de familles.

® La peur de la mise à nu de leur vie privée.

Il faut prendre le temps d’écouter, de rassurer pour lever les réticences. Tant que le jeune et sa famille ne seront pas convaincus de la nécessité de ce suivi, celui ci ne sera pas efficace ou ne se fera pas.

 

COMMENT SE SITUE LE SERVICE SOCIAL :

EXPLIQUER, ACCOMPAGNER, RASSURER, RESPECTER

L’assistant social a un rôle de médiation car il est important de préciser à ce jeune le cadre de nos interventions, d’expliquer les rôles de chacun, de l’accompagner et de le rassurer dans cette démarche, ceci dans le respect de sa personne.

Il est important de lui dire que ce suivi est du domaine de sa vie privée sans injonction ni contrôle de l’école.

 

CONCLUSION

Les établissements scolaires sont des lieux de vie, souvent révélateurs des difficultés des jeunes.

La pluridisciplinarité des personnels permet un travail de repérage des adolescents en difficulté.

Le Service Social En Faveur Des Elèves fait un travail de médiation qui s’inscrit généralement dans le temps pour :

 

EXPLIQUER, DEDRAMATISER, ACCOMPAGNER

un élève en difficulté vers une prise en charge qui permettra de l’aider.



[1] F. BERGOFFEN, Assistance Sociale, Service Social en Faveur des Elèves -  Académie de Nantes.